© Stringer . / ReutersUn puits d'extraction de gaz de schiste, situé dans le bassin permien, dans l'ouest du Texas, en octobre 2013.
C'est l'histoire de l'arroseur arrosé. Celle d'un château d'eau que Rex Tillerson ne veut pas
voir aux portes de son ranch, situé à Bartonville, au Texas. Avec une poignée de
ses concitoyens, le citoyen américain s'oppose au projet depuis des mois. L'édifice est destiné, en particulier, à
alimenter en eau les puits d'extraction de
gaz de schiste situés à proximité de cette petite ville prospère proche de Dallas, selon la méthode contestée de la fracturation hydraulique.
La polémique aurait dû
rester locale sauf que le propriétaire mécontent, Rex Tillerson, n'est autre que le patron d'ExxonMobil, la plus grosse compagnie pétrolière privée du monde.
UN RANCHÉVALUÉ À PLUS DE 5 MILLIONS DE DOLLARSM. Tillerson agit en connaissance de cause dans la mesure où il a investi plus de 31 milliards de dollars (22,5 milliards d'euros) dans l'extraction de gaz de schiste depuis qu'il est à la tête de la compagnie américaine. On imagine le nombre de châteaux d'eau que cela représente. Ceux-ci peuvent
pousser comme des champignons chez les autres, mais pas sous les yeux du patron d'Exxon.
Le patron d'Exxon craint, avec un certain nombre de ses concitoyens, que les nuisances du château d'eau fassent
perdre de la valeur à son luxueux ranch, évalué à plus de 5 millions de dollars. Outre l'aspect esthétique, c'est surtout le va-et-vient des camions transportant l'eau vers les puits d'extraction, qui inquiètent M. Tillerson. On le comprend : depuis 2007, il s'en est déjà ouvert pas moins de neuf à moins de deux kilomètres de sa propriété. Le dernier en date appartient à XTO Energy, un spécialiste du gaz de schiste racheté par Exxon en 2009, ce qui a permis au groupe de
devenir le leader américain dans le domaine.
PLAINTE EN NOM COLLECTIFTrois autres voisins se sont associés au patron d'Exxon pour
déposer une plainte en nom collectif en 2013 arguant que
« chacun des propriétaires a choisi Bartonville parce que la ville a adopté des réglementations dont le but est de prévenir des constructions indésirables ne correspondant pas à la nature du voisinage », explique le
document révélé le 20 février par le
Wall Street Journal.Fin 2013, M. Tillerson avait rappelé à des membres du conseil municipal que s'il avait investi dans son ranch, c'était après s'
être assuré que rien ne pourrait
perturber son environnement bucolique. Ce scénario digne d'une série télé tombe assez mal, au moment où Exxon s'est lancé dans une campagne pour
convaincre que l'extraction du gaz de schiste ne pouvait
avoir que des retombées positives pour les communautés locales.
« JE SOUTIENS REX »Le groupe a pu jusqu'à présent
être relativement convaincant au Texas où la densité de
population est assez faible, mais se heurte à beaucoup plus de réticences en Pennsylvanie ou dans l'Etat de New York, dont les sous-sols sont également riches en gaz de schiste. Quant aux défenseurs de l'environnement, ils se sont, bien entendu, engouffrés dans la brèche ouverte par cette dispute de voisinage.
Josh Fox, le réalisateur de
Gasland, un documentaire violemment anti-gaz de schiste a même pris la tête d'une touchante campagne de solidarité sur
Twitter pour
soutenir son nouvel ami d'Exxon sous le mot clé : #
ImwithRex (Je soutiens Rex).
M. Fox s'était lancé dans ce combat après qu'un groupe pétrolier lui a proposé de
forer au fond de son
jardin contre la somme de 100 000 dollars. Il en faudrait sans doute beaucoup plus pour
convaincre M. Tillerson, dont la rémunération a atteint 40 millions de dollars en 2012, de
finir par
accepter le château d'eau.
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