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© stopnucleaire31.org
3 longues années sont passées depuis la catastrophe nucléaire japonaise, et il est temps de faire un 1er bilan : démantèlement complexe, voire impossible...fuites d'eau radioactive...dissimulations...et décompte macabre des premières victimes.

Alors qu'il est notoirement admis que la catastrophe de Tchernobyl est responsable de la mort de dizaines, voire de centaines de milliers de personnes dans le monde, même si le débat est ouvert sur le chiffre définitif, les champions de la « com. » pro-nucléaire affirment, sans preuves, que la catastrophe nucléaire de Fukushima n'aurait pas fait le moindre mort.


En Ukraine, le chiffre lié à la mortalité nucléaire se trouve dans une fourchette qui va de 14 000 à plus de 985 000 morts.

Or à Tchernobyl, un seul réacteur avait fondu... pour 3 réacteurs à Fukushima...

A Tchernobyl la pollution a finalement été relativement jugulée puisque le cœur fondu est tombé dans la piscine de suppression de pression qui avait été fort heureusement vidée. Le déversement de 5000 tonnes de sable, d'argile, de plomb, de bore, de borax et de dolomite aura finalement évité le pire faisant tomber en quelques semaines la radioactivité au 1/50ème de sa valeur précédente...

A Fukushima, l'intense radioactivité qui se dégage en continu depuis 3 ans est évidemment beaucoup plus préoccupante et il n'est pas difficile de comprendre qu'elle a (et qu'elle aura pour longtemps) des effets sur l'environnement, et sur les humains.

Comment se fait-il dès lors que les gestionnaires de l'accident japonais continuent de prétendre qu'aucune mort ne serait consécutive à la catastrophe nucléaire ?

Une partie de la réponse nous vient d'une journaliste japonaise indépendante Mako Oshidori.

Elle était présente à la conférence de presse qui a suivi la conférence organisée par la section allemande de l'IPPNW (l'international Physicians for Prevention of Nuclear War) qui s'est tenue le 6 mars 2014, et elle a indiqué avoir découvert une étrange note de TEPCO qui disait clairement qu'il fallait « couper court aux questions de la journaliste de manière appropriée ».

La journaliste, riche de 3 ans d'études à la faculté de médecine de l'université des sciences de la ville de Tottori, a révélé que Tepco et le gouvernement censuraient la mort des travailleurs de Fukushima, et qu'elle avait été suivie par des agents dès qu'elle avait commencé à enquêter, prouvant la réalité de ses affirmations en produisant une photo prise à l'insu de l'agent qui la surveillait.

Elle a malgré tout réussi à interviewer un infirmier qui travaillait dans la centrale nucléaire de Fukushima après l'accident, et qui a cessé son travail en 2013.

Extrait : « jusqu'à maintenant plusieurs travailleurs de la centrale sont morts, mais seuls les décès de ceux qui sont morts pendant le travail sont rendus publics, et aucuns de ceux qui sont morts brutalement lorsqu'ils n'étaient pas en poste, n'est rapporté (...) il y a des travailleurs qui après avoir fini leur contrat, fortement irradiés finissent par mourir un mois plus tard, mais aucun d'eux n'est ni signalé, ni pris en compte au bilan des morts ... ».

Ces révélations confirment des rapports antérieurs, faisant état du mépris criminel de Tepco envers les vies humaines.

On voit là les effets des dernières mesures prises par le gouvernement japonais qui a mis en œuvre en début d'année une loi qui punit ceux qui divulgueraient des informations, notamment concernant le nucléaire et un fonctionnaire qui aurait provoqué la fuite d'informations risque jusqu'à 10 ans de prison.

Au-delà de ces morts dissimulés, le blog de Fukushima avait commencé dès le début de les comptabiliser, et la liste commence à être longue de ceux qui, directement, ou indirectement, sont décédés suite à la catastrophe.

Pour autant, ce n'est que plus tard que le décompte des disparus suite à l'accident ne sera possible, même si d'après l'expert nucléaire Arnie Gundersen, se basant sur le fait que les filles sont plus sensibles aux effets de la radioactivité, celles qui sont retournées vivre dans leur village malgré le danger, encouragées par les autorités, seront une sur dix à développer un cancer dans les 10 années à venir.

C'est l'occasion de découvrir le reportage du photographe japonais Toru Hanai qui dévoile comment vivent les enfants qui sont encore à Koriyama, à 55 km de la centrale dévastée.

En octobre 2013, Michel Chossudovsky, directeur du CFRON (centre for research on globalisation) avait déjà mis l'accent sur les liens étroits qui unissent les yakusas et Tepco, puisque cette organisation maffieuse est activement impliquée dans le recrutement du personnel chargé de la périlleuse opération de démantèlement de la centrale dévastée.

Cette organisation spécialisée dans le crime organisé cible particulièrement les précaires du pays, qui n'ont d'autres choix que d'accepter ce genre d'emplois sous payé, et à haut risque.

Et puis, il y a les oubliés... Tepco avait affirmé en novembre 2011 avoir « perdu la trace d'une centaine d'employés concernant leurs suivis dosimétriques et médical », alors que selon un ancien professeur de math de l'Université de Kyoto, la réalité est qu'ils seraient morts suite à de fortes doses de radioactivité.

En effet il semble que depuis quelques temps Tepco « perde la piste » de plusieurs de ses employés... le 20 juin 2011 il avouait en avoir perdu 69, puis le 21 juillet, NHK signalait la disparition de 198 d'entre eux, et selon « Fukushima Diary » il en aurait manqué 840 au 15 décembre 2011.

Quelques mois auparavant, d'après le témoignage d'un commerçant de Kawamata-machi, M.Sakuma, un jeune travailleur de 21 ans, qui avait travaillé de mars à juillet 2011 sur le site, est décédé chez lui, suite à un infarctus, sans qu'aucune autopsie n'ait été réalisée, et cette mort n'a donc pas été imputée à la catastrophe nucléaire. lien

Ce n'est pas une nouveauté, puisque le 14 mai 2011, Mr Osumi, l'un des travailleurs de la centrale, après s'être « senti mal » 2 jours auparavant, a été conduit à l'hôpital, ou il est finalement décédé, mais Tepco assure que son décès serait du à la fatigue ou au stress.

Plus récemment, le 28 mars 2014, un ouvrier est décédé après avoir été « enseveli sous des sédiments » ce qui a fait dire sans rire à Tepco que « c'est la première fois depuis l'accident atomique du 11 mars 2011 qu'un ouvrier meurt ».

On ne demande qu'à le croire.

L'un des employés a réagit sur internet après la mort de son camarade « ce qui est le plus tragique, ce n'est pas tant que le démantèlement coute cher, que les travaux n'avancent guère, qu'il y ait de l'eau contaminée, non, ce qui est le plus tragique, c'est qu'on ne sauve pas la vie de ceux qui œuvrent là ».

En effet, il s'est écoulé plus de 3 heures entre l'accident et l'arrivée du blessé à l'hôpital.

Ce n'est pas une nouveauté, car chaque fois qu'il s'agit de nucléaire, on constate l'opacité qui règne, au Japon et ailleurs.

Lors de l'effondrement du plafond d'une partie du site de stockage de déchets au Nouveau Mexique, appelé WIPP, dans lequel un incendie s'est déclaré, (un camion de transport de sel qui se trouvait au fond d'une galerie à pris feu) provoquant un rejet de gaz radioactifs dans l'environnement, ce n'est que plusieurs semaines après que l'information a commencé de filtrer.

Précisons que dans ce site se trouvent des centaines d'énormes futs contenant des déchets de plutonium, dont il faut rappeler que la période (ou demi-vie) est de plus de 24 000 ans.

En effet, l'effondrement s'est produit le 5 février, mais ce n'est que vers le 20 mars que l'information a été donnée par quelques rares médias.

Pour l'instant le site a été entièrement évacué, les travaux d'enfouissement ont été interrompus, et les nouveaux containers sont détournés vers une autre carrière d'enfouissement au Texas, les autorités ayant annoncé envoyer prochainement une équipe au fond de la mine « pour reprendre le contrôle complet du site ».

Affaire a suivre donc...

En France, le nouveau gouvernement tente de nous faire espérer que la transition énergétique aurait enfin le vent en poupe...mais quid de la volonté de la nouvelle ministre, face au nouveau premier ministre qui n'a jamais caché sa bienveillance pour le nucléaire.

En tout cas, d'après un sondage « France énergie éolienne/CSA » les français ont massivement plébiscité à 86% cette transition énergétique, sans attendre que les centrales traditionnelles soient en fin de vie.

D'autant que le ministère de l'énergie, faisant l'hypothèse d'une hausse modérée de la consommation électrique française d'ici à 2025, constate l'inutilité d'une vingtaine de réacteurs nucléaires, s'il faut en croire Laurent Michel, directeur général de l'énergie et du climat au sein du ministère qui s'est exprimé là-dessus devant la commission d'enquête parlementaire consacrée au nucléaire.

Comme dit mon vieil ami africain : « un tronc d'arbre a beau séjourner dans le fleuve, il ne devient jamais crocodile ».