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La Russie collabore étroitement au sein du quartet qui comprend l'Iran, l'Irak et la Syrie. On peut y ajouter le Liban, à cause de sa coopération sur le terrain avec le Hezbollah, un des partenaires de la coalition au pouvoir à Beyrouth.

Même les pays de la région perçus comme des partenaires des Etats-Unis commencent à apprécier la Russie et le leadership du président Vladimir Poutine. La remarquable réconciliation entre la Russie et la Turquie, à la suite de la tentative manquée de coup d'Etat dont Ankara attribue la responsabilité à un ecclésiastique qui réside aux Etats-Unis, est la preuve d'un mouvement tectonique de la géopolitique régionale.

Malgré de profondes différences, la Russie a su maintenir des relations cordiales avec d'autres pays normalement vus comme des protégés des américains et ennemis de l'allié syrien de la Russie. Au cours de l'année écoulée, Poutine a chaudement accueilli le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu tout en accueillant aussi avec respect les leaders saoudiens. Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a été récemment accueilli dans le golfe Persique à Doha, la capitale du Qatar, pour des pourparlers de haut niveau sur le règlement du conflit au Moyen-Orient.

Par opposition à ce respect généralisé de la Russie, le réputation des Etats-Unis est de plus en plus sombre. Après des décennies des guerres dévastatrices, d'échec de la construction nationale, de machinations fomentant des changements de régime, la position de Washington dans la région est diminuée, y compris même parmi ces alliés supposés. Les Israéliens, les Turcs et les Saoudiens font preuve, en privé comme publiquement, d'un mépris pour son mécène américain, malgré leurs alliances officielles.

Quand le bombardier supersonique russe Tupolev Tu-22M a décollé cette semaine de l'ouest de l'Iran pour mener des mission en Syrie, cela impliquait que Moscou est le principal acteur émergeant de la région, après des décennies de prétendue hégémonie des Etats-Unis.

Que la République islamique d'Iran, pour la première fois depuis la Révolution de 1979, ait adopté une disposition constitutionnelle sans précédent permettant à un pouvoir étranger d'utiliser son territoire pour des objectifs militaires, montre bien l'influence russe dans cette région sensible.

Même les ennemis officiels de l'Iran, Israël et l'Arabie saoudite, ne peuvent pas nier l'importance de ces évènements. L'Iran a résisté à des décennies de sanctions occidentales [imposées] sans considération pour ses droits souveraines et est prêt à confier l'accès territorial aux forces militaires russes.

Cela doit être vu comme une appréciation de l'intégrité de la Russie et de sa politique étrangère. A l'inverse de Washington qui est impliqué dans un double jeu et une perfidie qui n'échappe même pas à ses alliés présumés. Bref, Washington fait face à un déficit de confiance.

En parallèle, la Russie - quoi que certains Etats pensent de ses alliés en Syrie et en Iran - peut être perçu comme respectant sincèrement ses engagements.

Avant l'intervention militaire en Syrie fin septembre dernier autorisée par Vladimir Poutine, le gouvernement du président Bachar el-Assad était dans les cordes. Des rebelles et des militants soutenus par l'étranger menaçaient de renverser Assad pour atteindre leur but de changement de régime et ils étaient appuyés par Washington et ses alliés de l'OTAN, la Grande-Bretagne et la France, et ses partenaires régionaux, c'est-à-dire la Turquie, l'Arabie saoudite, le Qatar et Israël.

L'intervention audacieuse pour protéger l'allié traditionnel de la Russie à Damas a changé le cours de la guerre. En moins d'un an, la Syrie a récupérée une partie importante de son territoire et, maintenant, ce sont les militants soutenus par l'étranger qui sont au bord de la défaite.

La volte-face récente de la Turquie, ex-soutien aux militants en Syrie, en appelant à une intensification de la coopération avec la Russie et l'Iran pour le règlement du conflit syrien, c'est la reconnaissance tacite de la fin de cette guerre secrète pour le changement du régime. Et c'est grâce au pouvoir russe.

Un rapport de New York Times publié plus tôt ce mois-ci a candidement évalué le succès stratégique de la Russie en Syrie.

Faisant allusion à des répercussions géopolitiques plus vastes, le journal explique :
«Pour la première fois depuis l'Afghanistan dans les années 1980, les forces militaires russes ont mené au cours de la dernière année une lutte directe contre des forces des rebelles entrainées et soutenues par la CIA. Les combattants afghans soutenus par les Etats-Unis avaient pris le dessus dans ce conflit de la Guerre froide. Mais cette fois, le résultat a été jusqu'à présent diffèrent», ajoutant que «le succès militaire russe en Syrie a donné à un Moscou isolé après l'annexion [sic] de la Crimée et d'autres incursions en Ukraine de nouveaux leviers en ce qui concerne la prise des décisions sur l'avenir du Moyen-Orient.»
C'est pourquoi la réaction de Washington à cette percée dans le domaine de la coopération militaire avec l'Iran au cours de la guerre en Syrie a été [marquée par l'abattement].

Le département d'Etat américain a qualifié ce déploiement efficace des forces aériennes russes en Syrie de «regrettable». Et il a dénoncé le rapprochement de la Russie, l'Iran, l'Irak et la Syrie comme l'accentuation des efforts pour maintenir le «régime» d'Assad.

La Russie a notifié les Etats-Unis de ses survols en Syrie, selon leur procédure de désescalade du confliti. Mais il était évident que la Russie ne voulait pas de consultations de Washington. Moscou a élaboré un plan et n'a pas hésité à le mettre en œuvre malgré les réticences des Etats-Unis.

L'inquiétude américaine sur le rapprochement entre la Russie et l'Iran s'est révélé. D'abord, Washington a essayé d'ergoter en subtilités juridiques, arguant que les vols militaires russes était contraire à la résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU qui interdisait «la fourniture, la vente ou le transfert à l'Iran des avions de combat.»

Mais, comme l'a indiqué Sergueï Lavrov, l'accord n'avait rien à voir avec cette résolution.

«Ces avions de combat sont utilisés par les forces aériennes après l'autorisation de l'Iran pour les opérations anti-terroristes en Syrie à la demande légitime du gouvernement», a-t-il déclaré mercredi.

Ensuite, Washington a répondu avec la même vieille histoire disant que les opérations aériennes russes à Deir ez-Zor, Alep et Idlib visaient des «rebelles modérés.» Le porte-parole du Département d'Etat Mark Toner a assuré les journalistes que la Russie ne choisissait pas comme cibles extrémistes de l'EI ou Jabhat Fateh al-Sham (ex- Jabhat al Nusra), mais des rebelles «principalement modérés» soutenus par les Etats-Unis.

Bizarrement, lorsque sa conférence de presse en réponse aux opérations russes, le porte-parole de l'armée américaine en Syrie et en Irak, le colonel Chris Carver, a indiqué qu'il ne savait ou était situés les groupes terroristes interdits dans les secteurs ciblés.

Donc, comment se fait-il que le département d'Etat sait que la Russie frappe des rebelles «modérés», mais que le Pentagone ne sait pas ou les «terroristes» sont situés ?

Alors que la Russie gagne la guerre en Syrie au nom des autorités souveraines soutenues par la majorité des Syriens, Washington intensifie son double jeu et sa collusion avec ses marionnettes terroristes.

Washington perd toute confiance dans cette région stratégique parce que, depuis longtemps, il a oscillé entre des projets criminels et la duplicité. Même ses partenaires et clients traditionnels voient à travers ce spectacle abject qu'est la sale politique américaine.

Le pouvoir américain, irresponsable et non fiable, est à mépriser, si ce n'est à craindre.

La Russie a pris une position ferme soutenant ses alliés, et la situation en Syrie montre qu'elle a exécuté l'opération selon ses promesses, sans mensonges et sans intrigues. Une telle intégrité mérite le respect parmi ses alliés, les pays non alignés et ses adversaires.

Pendant trop longtemps, la Russie a vu les Américains découper et mutiler le Moyen-Orient avec leurs guerres et subversions en Afghanistan, en Irak, en Lybie et en Syrie. La Syrie marque un tournant historique des dommages américains infligés au Moyen-Orient.

La Russie est devenue une force d'équilibre à ne pas négliger. Heureusement.