Comment: Une preuve supplémentaire que les outils informatiques actuels suffisent déjà amplement au flicage intégral de la population. Qui a donc envie de voir débarquer sur son perron, la tête enfarinée, sans que l'on n'ait rien demandé, les sectateur d'un parti politique ? Ceux à l'esprit anesthésié qui s'extasient encore de la marche du progrès ? La nouvelle génération, habituée à faire étalage de sa vie sur les réseaux sociaux ? Sans aucun doute.

Pourtant, comme une inquisition déguisée, le temps n'est sans doute pas loin où l'on pourra assister à des dialogues du type :

- Bonjour Monsieur. Vous avez voté pour le candidat Sarkomence l'année dernière, mais nous venons de voir que vous faites les yeux doux, récemment, à la candidate Lapeine. Vous pouvez nous dire pourquoi ?

Ultimement, n'oublions pas que cette surveillance anodine ou déguisée ou déclarée et avérée n'existe que pour savoir ce que les gens ont réellement dans la tête. Une liberté de penser dans une boite crânienne qui représente un rempart, encore pour le moment, à la soif de contrôle absolu dont fait preuve la classe dirigeante.

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© Inconnu
L'équipe de campagne de Nicolas Sarkozy a mis à disposition des militants une application qui place sur une carte les internautes à aller rencontrer en porte-à-porte, qui ont aimé ou partagé des publications liées à l'ancien président de la République. Leur adresse postale est renseignée par recoupement d'informations obtenues sur les réseaux sociaux ou ailleurs.

Il faut se pincer pour y croire. Et pourtant. Ce vendredi, RMC révèle que depuis la semaine dernière, les militants qui font la campagne de Nicolas Sarkozy pour la primaire des Républicains emploient une application mobile baptisée Knockin, qui croise les informations obtenues sur Internet pour dresser des profils très précis de sympathisants de droite à qui rendre visite.

Sans que les internautes aient donné leur accord, l'application détecte qu'un internaute a « liké » une page de Nicolas Sarkozy ou retweeté un de ses messages, et va ensuite rechercher ailleurs les informations qui permettent, par recoupements, de savoir à cet internaute habite. Les militants peuvent alors se balader et voir autour d'eux les prétendus sympathisants à aller convaincre d'aller voter pour l'ancien président de la République lors de la primaire.

Selon le descriptif officiel de l'application distribuée sur Google Play, Knockin est un « véritable outil de gestion de bases de données, d'analyse cartographique et d'organisation de campagne (...) particulièrement spécialisé dans le porte-à-porte ». Les élus locaux, bénévoles, groupes de militants, peuvent utiliser l'application pour organiser leurs sessions de porte-à porte, en sachant précisément chez qui sonner, sans perdre de temps à visiter des sympathisants de gauche qu'il serait vain d'essayer de convaincre.

N'importe quel internaute peut consulter la carte

« Outil social, politique et innovant, Knockin est indispensable à l'homme politique moderne : les prochaines campagnes seront digitales ou ne seront pas », assure son créateur Paul Hatte, membre de l'équipe Digital & Innovation de la campagne de Nicolas Sarkozy.

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Interrogé par RMC, il affirme sans convaincre qu'il ne s'agit pas d'un « fichage », alors que le Larousse le définit comme l' « action de ficher quelque chose, quelqu'un, de mettre sur fiches ». Si créer des bases de données d'internautes avec leur orientation politique, leur nom et leur adresse n'est pas du fichage, alors on ne sait plus ce qu'est le fichage.

Axel Calandre, directeur de l'innovation pour la campagne de Nicolas Sarkozy, réfute également ce terme auprès de Numerama. Il assure que les « likes » ne sont pas exploités, et que les données affichées sont celles des membres du site Sarkozy.fr, sans s'expliquer néanmoins sur la possibilité donnée de compléter la carte d'un simple ajout via l'application.

La CNIL, pour sa part, a prévu de publier des « recommandations » d'ici la fin septembre, mais ne voit bizarrement aucune urgence à interdire l'application.

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Selon nos constatations, il suffit de s'inscrire sur le site de Knockin avec un identifiant bidon pour avoir accès à la géolocalisation des prétendus sympathisants, avec leur adresse précise, et leur nom. Il est aussi possible d'ajouter un contact à la base de données en tapant sur sa localisation. Potentiellement, n'importe quel internaute peut donc regarder si son voisin est un sympathisant de droite, ou s'il a été déclaré comme tel.

En pratique, l'application affiche quatre type d'icônes pour signaler les contacts à aller rencontrer (en rouge), ceux qui ont déjà été interrogés (en gris), ceux qui viennent d'être ajoutés manuellement (en bleu), et les militants présents sur le terrain (en jaune). Les points rouge sont toutefois rarissimes pour l'instant, ce qui est rassurant quant à l'ampleur de la violation de la vie privée qu'elle organise, heureusement limitée dans les faits. Mais l'idée reste là, et ça n'est qu'un début.

Mise à jour : la carte n'est plus visible sans cooptation depuis 14h30 par un autre membre ou sympathisant des Républicains. Notre article a été mis à jour pour ajouter les explications d'Axel Calandre.