Dans un entretien à une chaîne portugaise, le président syrien Bachar el-Assad a évoqué la situation dans son pays, ses attentes après l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis et le rôle de la Russie sur la scène internationale.


Commentaire : Il est à noter que le président élu Donald Trump approuve entièrement l'opération russe en Syrie menée contre le groupe djihadiste Etat islamique.


Bachar el-Assad
© SANA/Reuters« le problème syrien, en lui-même, n'a rien de compliqué : ce qui le complique, ce sont les ingérences étrangères, et particulièrement occidentales »
Dans l'hypothèse où le président élu Donald Trump appliquerait ses promesses de campagne une fois à la Maison Blanche et si « Washington commençait à combattre les terroristes plutôt que de les protéger », Bachar el-Assad a affirmé, dans un entretien à la chaîne portugaise RTP TV, que les Etats-Unis auraient de fortes chances de devenir « les alliés naturels » de la Syrie.
« La Syrie sera parmi les premiers à se joindre aux forces américaines si leur volonté est véritablement de frapper les terroristes et nous serons alors alliés, tout comme les Russes, les Iraniens et les autres pays qui veulent défaire les terroristes sont nos alliés naturels », a ajouté le président syrien.
Il a toutefois précisé que ses espoirs de voir la politique étrangère américaine effectuer un tel revirement étaient minces, y compris après l'alternance politique prévue pour janvier prochain, lorsque Donald Trump succédera officiellement à Barack Obama. Selon Bachar el-Assad, en effet, le nouveau président aura des difficultés à faire accepter l'idée d'une coopération avec la Syrie destinée à lutter contre le terrorisme, car il ne disposera que « d'une marge de décision restreinte et sera soumis aux pressions des lobbys, comme tous les autres présidents ». Concernant Donald Trump lui-même, le président syrien s'est montré mesuré : « Nous avons encore des doutes quant à sa capacité à tenir ses promesses ou non et nous sommes très prudents dans le jugement que nous portons sur lui. ».

En octobre dernier, le futur vice-président américain Mike Pence, avait prôné un durcissement des positions américaines envers la Syrie, impliquant notamment « l'usage de la force militaire ». Réagissant à ces propos, Bachar el-Assad avait fustigé le rôle de « police du monde autoproclamée » que jouerait Washington. « Les Etats-Unis sont un pays souverain, un pays indépendant, mais ils doivent s'en tenir là : ils n'ont pas à interférer dans les affaires d'un pays étranger », a déclaré le président syrien, ajoutant que la démocratie « ne s'impos[ait] pas et ne s'import[ait] pas ». Le président syrien a d'ailleurs fait part des espoirs qu'il plaçait dans le prochain secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, afin qu'il mène une médiation entre les différents acteurs du conflit.

Concernant la démocratie dans son propre pays, Bachar el-Assad a déclaré que « la Syrie ne [pouvait] être qualifiée de démocratie pour l'heure », ajoutant qu'elle « continu[ait] à avancer dans ce sens ». Il a néanmoins tenu à souligner que les évolutions politiques en Syrie ne sauraient se mesurer en termes occidentaux. « L'Occident a sa propre culture, nous avons la nôtre ; ils ont leur propre réalité et nous la nôtre. C'est pourquoi notre démocratie devrait être le reflet de notre culture et de nos mœurs, de nos traditions, et de notre réalité en même temps », a-t-il tenu à préciser.

Bachar el-Assad dénonce une « guerre internationale contre la Syrie »

Interrogé sur la position de meilleur allié qu'occuperait Vladimir Poutine vis à vis de la Syrie, Bachar el-Assad a refusé de privilégier un pays par rapport à un autre, rappelant l'utilité du soutien fourni par l'Iran ou le Hezbollah. Il a toutefois précisé que ces derniers, ainsi que la Russie, agissaient en Syrie avec le feu vert du gouvernement syrien, quand l'intervention occidentale n'avait pas été demandée par Damas. Il a qualifié celle-ci de « guerre internationale contre la Syrie ».

« C'est la raison pour laquelle je répète souvent que le problème syrien, en lui-même, n'a rien de compliqué : ce qui le complique, ce sont les ingérences étrangères, et particulièrement occidentales » a affirmé Bachar el-Assad. Il a notamment pointé du doigt « le soutien qu'apportent les Etats-Unis, l'Arabie Saoudite, le Qatar et la Turquie aux terroristes » en Syrie.

Il a également salué l'aide des alliés russes et leur respect « de la souveraineté des autres pays », rappelant que la Russie n'avait pas interféré dans les affaires politiques internes de Damas et que cette coopération avait été «entièrement librement consentie».

« Les Russes se battent certes pour nous, mais aussi pour le monde et pour eux-mêmes », a indiqué le président syrien. « Moscou défend ses propres intérêts en combattant le terrorisme en Syrie et en aidant à faire appliquer le droit international : il serait temps que les pays occidentaux s'en aperçoivent et le prennent en compte », a-t-il conclu.