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C'est du jamais vu. Le 13 septembre, l'astronomes amateur brésilien José Luis Pereira a lancé l'alerte : il vient d'observer un flash sur Jupiter. Il s'avère que 5 autres télescopes ont vu cette collision entre un astéroïde et Jupiter, dont 3 situés en France.

Le 13 septembre 2021, José Louis Pereira observe Jupiter comme tous les soirs depuis le Brésil avec son télescope Newton de 275 mm de diamètre. Pourtant, ce soir-là, le ciel n'est pas très stable et partiellement voilé. S'il persiste, c'est dans l'espoir de détecter un flash sur Jupiter. C'est-à-dire l'entrée d'un petit corps dans l'atmosphère de la planète géante. Il les traque depuis des années dans le cadre du programme DeTeCt piloté par l'astronome amateur français Marc Delcroix et le groupe de planétologie de l'université de Bilbao. Après avoir observé, il a analysé sa vidéo avec le logiciel DeTeCt. Et ses années de persévérance payent enfin. La vidéo montre un flash sur plusieurs images consécutives à 22h41 TU.

De nombreuses confirmations en Allemagne, en Italie et en France

Rapidement, Simone Galelli, un autre amateur situé en Italie équipé d'un Dobson de 609 mm, rapporte sur Facebook avoir aussi constaté l'impact en observation visuelle. Le lendemain, d'autres détections pleuvent. D'abord celle de l'Allemand Harald Paleske avec un télescope de 408 mm.

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Mais le gros des confirmations vient de France. Des amateurs de la Société lorraine d'astronomie — Thibaut Humbert, Stéphane Barré, Alexis Desmougin et Didier Walliang — sont actuellement en mission sur le télescope de 620 mm d'Astroqueyras. Ils ont filmé l'impact avec ce puissant télescope et obtiennent les données le plus qualitatives.

Par un hasard extraordinaire, Jean-Paul Arnould, membre du même club, a lui aussi observé Jupiter ce soir-là, mais depuis la Lorraine. Son télescope de 280 mm montre clairement l'impact.

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Enfin, Michel Jacquesson, passionné de Jupiter et très actif dans le suivi de l'évolution de ses nuages, a lui aussi filmé la collision avec son petit télescope de 203 mm.

L'impact de tous les records

Jamais un impact n'avait été observé simultanément par six télescopes, et il est encore plus remarquable que trois des six observations aient été faites depuis la France. Jusqu'ici, une seule détection avait été réalisée depuis la France par le Corse Sauveur Pedranghelu depuis Afa, le 26 mai 2017.

En tout depuis 9 impacts ont été détectés (en 1994, 2009, 2010, 2010, 2012, 2016, 2017 et 2019) et seul le plus spectaculaire en 1994 avait été découvert par les astronomes professionnels. Ceci souligne toute l'importance des amateurs dans ce domaine.

Un succès pour le programme DeTeCt

Cette observation est aussi un succès pour le programme DeTeCt conçu par l'université de Bilbao et Marc Delcroix, car c'est la seconde fois qu'une alerte est lancée à partir d'une détection faite avec ce programme. Mis au point en 2013, il n'a connu son premier succès qu'en 2019 avec le flash du 7 août détecté par l'Américain Ethan Chappel. Les non-détections sont également utiles, car elles permettent de mettre à jour une base de données tenue par Marc Delcroix.

Dater le Système solaire

L'enjeu est de mieux connaître le taux d'impact actuel au niveau de Jupiter. L'impactisme joue en effet un rôle majeur en planétologie car le degré de cratérisation d'une surface planétaire donne une indication de son âge. Or, pour dater précisément, il est important de bien connaître le taux d'impacts actuel. Ce qu'il a été par le passé est issu d'un croisement entre des observations de surfaces planétaires et des modélisations.

Un impact majeur ?

Des analyses plus poussées de ces observation seront nécessaires pour évaluer la taille du corps à l'origine de l'impact. On note en tout cas qu'il est relativement important : il est visible pendant environ 2 s et il sature les capteurs au moment de son pic de luminosité. Pour tous les flashs observés jusqu'ici, la taille de l'impacteur a été évaluée dans une fourchette de 10 à 20 m environ. C'est en ordre de grandeur comparable à l'impact survenu sur Terre en 2013 à Tchéliabinsk en Russie.

Une heure après ces observations, le Britannique Damian Peach a observé Jupiter conjointement avec un second amateur, E. Enzmann, équipé d'un télescope de 500 mm aux Canaries.

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L'image obtenue très détaillée ne montre aucune trace persistante de l'impact. En fait, seuls les impacts majeurs parviennent à produire des marques sombres persistantes. Ça a été le cas lors de la collision de 1994 entre la comète SL9 et Jupiter. Et à nouveau en 2009 avec une nouvelle trace sombre découvert par l'amateur australien Anthony Wesley. Sur cette observation, la taille de l'astéroïde avait été estimée entre 200 et 500 m.

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