L'analyse par reconnaissance faciale des images captées par drones va être ré-autoriser dans la loi « responsabilité pénale et sécurité intérieure ». Pour une raison incompréhensible, le Conseil constitutionnel n'a toujours pas été saisi par les parlementaires.

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La surveillance par drones au moyen de la reconnaissance faciale

La loi « responsabilité pénale et sécurité intérieure » a fini d'être examinée par le Parlement le 18 novembre dernier. Elle sera définitivement adoptée le 16 décembre. Elle prévoit notamment de ré-autoriser les drones policiers.

Tout comme l'article 47 de la loi sécurité globale, les articles 8 et 8 bis autorisent la police administrative et la police judiciaire à déployer des drones de surveillance.

Cette surveillance par les drones se trouve être reprise dans le nouveau texte sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure, à travers son article 8.

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La nouvelle loi propose de supprimer le second alinéa de article L242-1 du code de la sécurité intérieure qui, créé par la loi sécurité globale au sujet des drones, interdit « l'analyse des images issues de leurs caméras au moyen de dispositifs automatisés de reconnaissance faciale ».

Elle remplace cette ancienne interdiction générale par une disposition bien plus limitée, introduite à l'article L242-4 de ce même code : l'interdiction d'installer des logiciels de reconnaissance faciale sur les drones eux-mêmes.

En comparaison avec le droit actuel, désormais, plus rien n'empêchera les images captées par drones d'être analysées par des logiciels de reconnaissance faciale installées sur d'autres dispositifs que les drones eux-mêmes.

Cette analyse pourra notamment être un rapprochement par reconnaissance faciale avec l'une des 9 millions de photographies contenues dans le fichier de traitement des antécédents judiciaires (TAJ), tel que prévu par le décret du 4 mai 2012.

La loi prévoit désormais que les images ainsi captées seront conservées 48 heures afin d'être transmises au procureur si elles révèlent une infraction.

L'article 9 de la nouvelle loi change entièrement de logique : il ne prévoit plus aucune finalité, mais se contente de prévoir que les caméras embarquées pourront être activées « lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident ».

Avec cette nouvelle logique, la loi ne décrit plus ni la nature des « incidents » justifiant la surveillance, ni l'objectif même de cette surveillance.

Pas de saisine du Conseil Constitutionnel

Les députés ont adopté ce texte en première lecture, le 23 septembre dernier. L'Assemblée nationale et le Sénat ont achevé leurs travaux sur le projet de loi relatif à la responsabilité pénale et la sécurité intérieure, le 18 novembre, en parvenant à un accord en commission mixte paritaire sur les points qui restaient en discussion.

Le texte de loi, qui comporte 20 articles, s'inscrit dans le sillage de la proposition de loi sur la sécurité globale, renommée par la suite en loi pour une sécurité globale préservant les libertés, qui elle, avait connu une gestation difficile, notamment sur l'utilisation des drones.

Cette mesure avait été d'ailleurs censurée par le Conseil constitutionnel

Or cette surveillance par les drones s'avère reprise dans le nouveau texte sur la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure, à travers son article 8.

Non seulement la nouvelle loi ne corrige aucun des graves manquements qui avaient justifié la censure de la loi sécurité globale mais, plus grave, elle en ajoute de nouveaux. Notamment, elle autorise les images captées par drones à être analysées par reconnaissance faciale, ce que la loi sécurité globale avait explicitement interdit.

En théorie, tout devrait conduire à une nouvelle censure des drones dans cette nouvelle loi. Pourtant, à ce jour, le Conseil constitutionnel n'a toujours pas été saisi par les parlementaires et aucun des groupes parlementaires n'ont réuni les 60 députés ou 60 sénateurs nécessaires pour saisir le Conseil, ce qui avaient été fait sans soucis contre la loi sécurité globale.

Pour une raison incompréhensible, surtout en période électorale où l'on attendrait de l'opposition qu'elle joue toutes ses cartes, il semble que le Parti Socialiste hésite encore à attaquer cette nouvelle loi, dont la contrariété à la Constitution est pourtant plus importante que la précédente loi qu'il n'avait pas hésité à attaquer.

Pourtant, l'Observatoire des Libertés et du Numérique, a transmis, le 16 novembre, une analyse juridique aux députés et sénateurs de gauche afin de les convaincre de saisir le Conseil constitutionnel.

L'apathie des oppositions, ajoutée à la pandémie, permettra, demain, au gouvernement de déployer dans l'espace public des technologies intrusives, dont l'utilisation s'inscrit dans un tournant sécuritaire plus large, d'autant plus inquiétant que l'exécutif entend renforcer le contrôle de masse.