Entretien Louis Fouché, Mehdi Belhaj Kacem et Fabien Moine autour de la crise actuelle. Beaucoup d'encre a coulé depuis le déclenchement mondial de la "crise du Covid-19". Et pourtant, les réactions des philosophes sur la question laissent entièrement à désirer. La plupart ont pris pour argent comptant la narration officielle faite de ladite "crise", et n'ont pas songé à interroger les fondements mêmes de cette narration, pourtant d'évidence cousue de fil blanc en tous ses points stratégiques.
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C'est fort des concepts développés dans son livre-référent, Système du pléonectique, que Mehdi Belhaj Kacem montre que les questions les plus cruciales de la philosophie moderne sont reposées à tout nouveaux frais à la faveur de cette "crise", montée de toutes pièces par les plus hautes institutions supranationales et les plus puissantes multinationales du monde. Par exemple : Qu'en est-il du concept, crucial dans la modernité philosophique et politique, d'"anarchie" ?

Qu'en est-il du critère de rationalité dans le discours, à la lumière de cette "crise" ? Qu'en est-il, après Heidegger, Lacan, Badiou ou Schürmann, du concept de vérité, à l'ère de la technoscience devenue folle ? Que penser du concept de "nihilisme", ou de ce que Lyotard a appelé "la fin des grands récits" ? Que faire encore des notions politiques de "gauche" et de "droite", quand on les subsume à l'impératif totalitaire du biopolitique ? Quel lien unit, depuis nos origines, le concept de science au concept de politique ? Pourquoi l'insurrection des gilets jaunes, à partir de novembre 2018, a-t-elle signifié un événement aussi prophétique que salutaire, jetant rétroactivement un éclairage saisissant sur la "crise du Covid-19" ? Comment repenser l'éthique, quand l'impératif catégorique moderne se réduit à la peau de chagrin d'un "pense, vis et agis en toutes circonstances de façon à ne pas à attraper, ni transmettre, un virus" ?