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© D.R.Benjamin, l'un des rescapés, a pris cette photos quelques minutes seulement avant que les éléments ne se déchaînent. Grêle, tonnerre et foudre. Rien ne leur a été épargné.
Le corps de l'homme qui est mort foudroyé mardi après-midi au sommet du Canigou a été restitué à sa famille. Âgé de 51 ans et d'origine britannique, il était installé depuis une vingtaine d'années sur Prades. Mardi il était parti seul avec son chien effectuer l'ascension de la plus célèbre montagne des Catalans.

Vers 14 heures, il se trouvait au pic comme une vingtaine d'autres randonneurs en groupe distincts, certains étant montés pour porter les fagots pour le feu de la Saint-Jean qui va s"embraser ce soir, quand le temps a viré en quelques minutes. Des violents orages se sont soudain abattus sur eux.
La foudre est tombée sur le malheureux qui a été tué sur le coup. Les constatations effectuées sur les lieux par les militaires du PGHM (peloton de gendarmerie de haute-montagne) d'Osséja ont permis de confirmer qu'il a été frappé par un courant électrique direct.

Les blessés sortis de l'hôpital

Sept autres promeneurs, dont une femme, ont eux été électrisés par un courant de sol autrement dit des décharges qui tapent contre les rochers et sont répercutés alentours. Aidés par ceux qui étaient indemnes, tous ont fui le sommet dans la précipitation par la voie habituelle ou par la cheminée du Canigou tout en donnant l'alerte depuis leurs téléphones portables. Les CRS de Bolquère, spécialistes du secours en montagne, ont immédiatement déployé des moyens importants, renforcés par l'hélicoptère Dragon 66 de la sécurité civile, afin de récupérer le corps du défunt et évacuer les blessés vers la clinique de Prades.

Souffrant de légères brûlures, de fourmillements, de plaies diverses dues aux chutes... ils ont fait l'objet d'examens de contrôle, électrocardiogramme.... puis ont été transférés à l'hôpital de Perpignan pour des analyses complémentaires.

Tous, domiciliés dans le département ou dans la région de Gérone, ont tour à tour pu rentrer chez eux au fil de la nuit et retrouver leurs familles.
L'enquête est toujours en cours. Reste aux gendarmes à entendre l'ensemble des témoins même si les circonstances du décès paraissent clairement établies. Un drame, au hasard de la colère du ciel. Totalement imprévisible.

Benjamin, comme tous les rescapés de cette histoire, n'oubliera jamais. La peur, le choc mais aussi la véritable solidarité qui s'est nouée entre eux dans l'adversité.

« C'était la première fois que je montais le Canigou. Et c'était la dernière. Les montagneux, eux, y retourneront. Il faisait un temps magnifique. Nous, on était un groupe de 4. On est monté en 4x4 jusqu'au refuge des Cortalets et on a voulu faire la boucle en passant par la cheminée.

Vers 13 h 30, on a fait une pause déjeuner et on ne voyait pas le mauvais temps arriver. Vers 13 h 45, un nuage gris est apparu mais pas vraiment menaçant. On s'est dit que l'on allait ranger pour terminer l'ascension et rentrer. Je me suis retrouvé à 1,50 m du sommet avec un copain, à côté d'un groupe d'Espagnols et la grêle a commencé à tomber.

Il y a eu une accalmie. Puis à nouveau la grêle et après ça, on a connu l'enfer. La foudre. On a vu l'homme s'effondrer mais on ne savait pas s'il était mort. C'est indescriptible le bruit que cela peut faire. J'ai été touché comme les autres. Les arcs m'ont fait lâcher la paroi. Je suis tombé à la renverse quand un des Espagnols m'a rattrapé par la sangle de mon sac à dos. J'ai repris mes esprits. J'avais l'impression que ma jambe était cassée mais cet homme m'a dit en catalan : "Ne t'inquiètes pas, ça va passer" ».

Puis on a pris une deuxième secousse. On s'est protégé comme on a pu. On a eu vraiment peur, on ne voulait pas subir d'autres coups de tonnerre. On est descendu et dès que l'on a eu du réseau on a appelé les secours. Je suis un miraculé ou pas loin. Un copain m'a dit qu'il m'avait vu mourir. Après on a eu un sentiment de culpabilité à se demander si on avait été inconscient. Mais non, c'était vraiment imprévisible et on a pris les bonnes décisions.

Mais on ne pourra pas l'oublier parce qu'on a laissé derrière nous une personne qui est décédée. Je veux remercier du fond du cœur toutes les personnes qui ont été là tout au long de notre périple. Les secours qui par leur professionnalisme, leurs paroles ou leurs gestes ont su atténuer notre traumatisme, nos blessures. Et une pensée pour cette personne foudroyée et ses proches, pour les six partenaires d'infortune, et un grand merci à « Josep », Catalan de Gérone, qui m'a sauvé la vie. Sans sa main, c'est sûr, je ne serais pas là pour le raconter ».