agriculteurs allemagne janvier 2024
Silence radio dans la presse française ? Normal, cela nous concerne. Soutenus par de nombreux autres groupes professionnels, les agriculteurs allemands manifestent pour le droit de produire et se rendre utile à la société.

La suppression de l'exonération fiscale du diesel agricole a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase, l'étincelle qui a allumé un feu de la protestation. Le mécontentement, qui couvait depuis longtemps contre la politique « verte » insensée et destructrice et contre la manière arrogante avec laquelle elle est imposée par l'UE et la coalition « Feux tricolores » (socialistes, libéraux et verts) au pouvoir à Berlin, a éclaté en une gigantesque vague de manifestations et de rassemblements.

Dépassant le monde agricole, des chauffeurs de camion et de bus, des enseignants, des médecins, des artisans, des boulangers, des restaurateurs et d'autres personnes touchées par les différentes coupes (qui doivent notamment servir à financer les budgets de la défense et de la protection du climat) se sont joints aux manifestations.

Quelque 100 000 tracteurs et autres véhicules agricoles étaient dans les rues des seize Länder le lundi 8 janvier pour protester à une échelle sans précédent et avec un large soutien de la population.

Et ce n'était que le prélude d'une semaine d'actions précédant la table ronde avec le gouvernement fédéral le 15 janvier à Berlin, au cours de laquelle d'autres événements ont été organisés sur l'ensemble du territoire allemand.

Ainsi, le 10 janvier, une grande manifestation a eu lieu à Dresde avec plusieurs centaines de tracteurs et 20 000 manifestants. Un millier de tracteurs ont défilé à Augsbourg et à Mayence, et des agriculteurs ont également manifesté à Kassel et à Düsseldorf. A Wilhelmshaven, des tracteurs ont bloqué l'accès au terminal de conteneurs ; à Brême également, toutes les routes d'accès au port ont été bloquées dans la matinée, ce qui a paralysé le trafic pendant plusieurs heures. Les bateaux ne pouvaient pas quitter le port car ils attendaient leur chargement. A Plauen, 500 tracteurs sont entrés dans la ville.

Le 11 janvier, des actions plus importantes ont été signalées à Flensburg, Lübeck et Francfort-sur-le-Main, avec 1500 à 2000 tracteurs dans chaque ville. Dans le Brandebourg et la Saxe-Anhalt, des tracteurs ont bloqué des dizaines d'accès à l'autoroute. 500 tracteurs ont servi de toile de fond à une rencontre entre les représentants des syndicats agricoles et le chancelier allemand Olaf Scholz à Cottbus, venu inaugurer un nouveau dépôt ferroviaire dans la ville. Et tout cela n'est qu'un début, le point culminant étant une grande manifestation à Berlin le 15 janvier.

Comme le soulignent les militants paysans, il s'agit de bien plus que des subventions publiques que le gouvernement veut supprimer. Il s'agit plus largement d'abandonner les orientations néfastes de la PAC actuelle. Les agriculteurs demandent que la table ronde soit l'occasion d'une discussion sérieuse sur la valeur de l'agriculture et d'une protection contre les idéologues « verts » autoproclamés.

Les tentatives du gouvernement et des médias dominants de discréditer la fronde croissante en affirmant qu'elle est infiltrée par « l'extrême droite » ont totalement échoué et se retourneront probablement contre eux. Un militant a résumé l'ambiance : « Ce n'est que la pointe de l'iceberg, pour être honnête - car nous sommes tous d'accord pour dire que nous voulons nous débarrasser des politiciens qui essaient de se débarrasser de nous ».

Dans toutes les actions, les participants ont été très disciplinés et ont coordonné leurs actions avec la police. Le président du syndicat allemand de la police, Rainer Wendt, a déclaré le 8 janvier au quotidien Bild : « Jusqu'à présent, les protestations sont disciplinées et responsables. Nous ne nous attendions pas à autre chose, toutes les tentatives de criminaliser nos agriculteurs et de les pousser à l'extrême-droite ont échoué. Les voies de secours sont planifiées et sécurisées, la concertation et la coopération avec la police sur place fonctionnent. Tout cela distingue cette protestation démocratique en bonne et due forme de l'arbitraire criminel des 'Klimakleber' (ceux qui se collent à des œuvres d'art pour attirer l'attention des médias). »

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La présidente du Mouvement des droits civiques Solidarité (BüSo), Helga Zepp-LaRouche, a souligné lors d'un entretien avec des militants le 8 janvier :
« Ces actions sont incroyablement importantes pour l'Allemagne, car plusieurs leaders paysans ont dit très clairement qu'ils avaient le courage de se mettre de l'avant, car ils défendent non seulement les intérêts des paysans, mais de toute l'Allemagne, contre un gouvernement que beaucoup qualifient de 'déchet' ... De nombreuses voix font remarquer que la politique agricole n'est pas faite par le gouvernement, mais par la Silicon Valley, Wall Street, BlackRock et les cartels internationaux. »
En fait, c'est la « réalité parallèle » artificielle que les politiciens et les médias dominants ont voulu créer qui s'effondre.

Lors des protestations dans de nombreuses villes, le BüSo était présent avec des affiches disant « Des tracteurs au lieu de chars » et distribuait des tracts intitulés « Transformons les épées en socs de charrue », qui demandent une reconversion des capacités militaro-industrielles vers la production de biens pour un développement économique pacifique.

La progression du mouvement est suivie de près dans d'autres pays. Des fermiers des États-Unis ont envoyé des messages de soutien disant « Faites rouler les tracteurs ! »

Sur le terrain

Berlin :
C'est là que les actions des agriculteurs étaient probablement les mieux coordonnées. Tout s'est déroulé en ordre et comme prévu. Des barrages filtrants aux entrées d'autoroute, les points de rassemblement pour les tracteurs, mais aussi pour les camions et autres véhicules, étaient bien organisés. Les discours avaient un message clair : le gouvernement est désespérément incompétent et déconnecté de la réalité. Avec sa politique, il ruine l'agriculture et même des exploitations qui se sont transmises de génération en génération depuis plus de 500 ans. A la manifestation de la porte de Brandebourg, il n'y avait pas que des agriculteurs, mais aussi des entrepreneurs du BTP, des transporteurs et de nombreux citoyens qui voulaient simplement montrer leur soutien. Le vase « n'a pas seulement débordé, il a déjà éclaté », disaient beaucoup. Certains se coordonnent déjà avec les pays européens voisins. Les propositions du Büso pour la reconversion de l'industrie d'armement et pour mettre les cartels hors d'état de nuire, ont trouvé bonne réception.

Munich :
Environ 6000 tracteurs étaient présents en ville, la plupart sur le Mittlerer Ring et sur la prairie de l'Oktoberfest. Seuls quelques-uns étaient sur la Ludwigstraße et la Leopoldstraße, qui leur étaient interdites depuis le lieu de la manifestation, l'Odeonsplatz, jusqu'à la Münchner Freiheit. Il y avait tout de même entre 8000 et 10 000 personnes sur la place, donc aussi des représentants d'autres professions. Un participant a déclaré qu'il n'avait jamais vu une manifestation aussi importante à Munich au cours des 40 dernières années et que la chute du gouvernement fédéral était ainsi scellée.

Les porte-parole de la manifestation étaient le président de l'Association bavaroise des agriculteurs (BBV), Günther Felßner, le président de la Landschafft Verbindung (LsV), Claus Hochrein, le président de l'Association bavaroise des propriétaires forestiers, Josef Ziegler, ainsi que Balthasar Höfer pour la Jeune agriculture. De brèves déclarations de soutien sont venues de représentants de l'Association de l'économie bavaroise (VBW), de l'artisanat de la boulangerie, de l'Association des bouchers, de la Fédération des meuniers, des entreprises de travaux agricoles et de l'Association de l'hôtellerie et de la restauration. Tous les orateurs ont critiqué le fait que le gouvernement fédéral, qui a enregistré les recettes fiscales les plus élevées de tous les temps, n'a pas été en mesure de créer un budget conforme à la Constitution et qu'il veut justement économiser un milliard sur le dos des agriculteurs, mais refuse de toucher, par exemple, au 8 milliards de subventions pour le kérosène de l'aviation. Ils ont tous demandé au gouvernement de démissionner et de permettre la tenue de nouvelles élections. Le seul orateur issu des partis gouvernementaux était le député fédéral Karl Bär, des Verts, qui a été massivement hué et qui a donné un spectacle lamentable, ne voulant apparemment pas comprendre pourquoi les agriculteurs en avaient marre.

Felßner a accueilli plusieurs représentants de la CSU, dont le député européen Manfred Weber, la ministre bavaroise de l'Agriculture Michaela Kaniber, d'autres ministres de Bavière et des députés du Landtag. On veut manifestement ramener la CDU/CSU au gouvernement, c'est pourquoi même la très conservatrice DBV, la plus grande organisation professionnelle agricole allemande, participe pleinement à ces actions.

Stuttgart :
à Stuttgart, environ 2000 manifestants se sont rassemblés dans le centre-ville, dont environ 500 étaient venus de toute la région avec leurs tracteurs ou autres véhicules utilitaires. Ce sont surtout les artisans et le secteur de la logistique qui étaient fortement représentés aux côtés des agriculteurs ; les principales revendications sur leurs pancartes visaient la démission de la coalition gouvernementale et la revalorisation générale du travail agricole.

Les passants se sont presque tous solidarisés avec les manifestants lorsque le cortège de tracteurs a quitté le point de rassemblement central pour se rendre à la manifestation, des photos ont été prises par téléphone portable aussi bien par les spectateurs que par les passagers des lourdes machines.

Les organisateurs ont souligné que la coopération avec la police s'était déroulée dans la convivialité, et qu'aucun incident de circulation n'avait été signalé. Depuis le camion sono, les orateurs ont remercié la population urbaine pour son affluence et son soutien massif aux revendications des agriculteurs.

Après trois brèves interventions de représentants des agriculteurs dénonçant l'incompétence de la coalition « Feux tricolores » et discréditant le ministre de l'Agriculture (originaire de Stuttgart) Cem Özdemir, le micro a été ouvert pour d'autres déclarations de la foule. Outre deux représentants syndicaux et un gardien de chèvres du Jura souabe qui avait amené trois de ses quadrupèdes dans sa remorque, des « citoyens lambda » et des artisans ont pris la parole, louant l'initiative des agriculteurs et demandant que les protestations soient étendues à d'autres catégories professionnelles.

Un représentant du Büso est également monté sur le podium et a assuré à la foule et aux agriculteurs que la solidarité avec les protestations des agriculteurs dépassait les frontières de l'Allemagne et que des messages de soutien étaient même parvenus des États-Unis, en plus de la participation parfois active d'agriculteurs des Pays-Bas, de France, de Pologne et de Hongrie. Il a lu quelques lignes de la déclaration de solidarité des principaux représentants agricoles de onze États américains, ce qui a été accueilli par les acclamations de la foule et les commentaires reconnaissants des organisateurs.

Wiesbaden :
Environ 2000 tracteurs et camions, dont de nombreux jeunes agriculteurs avec leurs familles, venus parfois de lieux très éloignés comme Fulda, à 140 km de là, d'où ils étaient partis le matin à 2 heures, ont participé à la manifestation de Wiesbaden. Lors du rassemblement final devant la chancellerie du Land de Hesse, le président de l'Association des agriculteurs de Hesse (HBV), Karsten Schmal, a remis une résolution au chef de la chancellerie Axel Wintermeyer.

La HBV n'attendait que 1000 tracteurs. L'adjoint de Schmal, Thomas Kunz, a déclaré à la Hessischer Rundfunk : « Nous sommes très, très agréablement surpris par nos propres membres et sympathisants. Cela montre la grande motivation qui règne dans notre secteur professionnel, mais aussi dans les régions rurales ».

La rédaction scolaire d'un élève de 13 ans sur le thème : « Pourquoi le gouvernement est-il si stupide de ruiner les agriculteurs ? », a été lue par son père depuis le podium. Mais dans la foule devant la chancellerie, plusieurs autres professions étaient représentées - boulangers, restaurateurs, syndicalistes. Un couple âgé et aisé manifestait avec une pancarte : « Sauvez l'économie allemande ».

Mayence :
Quelque 2000 manifestants et tracteurs ont participé à la manifestation au parc des expositions de Mayence. Des photos prises depuis les viaducs autoroutiers montrent de nombreuses manifestations, mais aucun embouteillage, car l'organisation était incroyablement bonne. Selon la police, le cortège comptait jusqu'à 1000 tracteurs et camions et s'étendait sur 20 km. Le président régional de la Landschafft Verbindung (LsV), le président de l'Association des agriculteurs et des viticulteurs et le président de l'Association allemande de l'hôtellerie et de la restauration DeHoGa en Rhénanie-Palatinat ont pris la parole lors de la manifestation.

Dresde :
le 8 janvier, les agriculteurs protestataires ont bloqué les accès aux autoroutes autour de Dresde, ce qui a été accepté et soutenu par la population. Environ 900 participants étaient attendus à la manifestation dans la ville, mais la foule a gonflé jusqu'à 5000 personnes à midi, le soir les médias ont même rapporté qu'environ 13 000 personnes y avaient participé. Parmi la foule, il n'y avait pas que des agriculteurs, mais aussi beaucoup d'autres professions qui souffrent de la politique du gouvernement de Berlin, comme des boulangers, des artisans, des restaurateurs et des services de soins.