Image
La momie d'Ötzi, l'homme des glaces, est conservée au musée archéologique de Bolzano en Italie. © Andrea Solero / AFP
Le décryptage du génome de la momie vieille de plus de 5 300 ans suggère qu'Ötzi pourrait avoir eu des origines corses ou... sardes.

On savait déjà qu'Ötzi, alias Hibernatus, avait autour de 45 ans lorsqu'il fut mortellement blessé, entre 3 350 et 3 100 avant notre ère, par une flèche de silex retrouvée plantée dans son dos, près de son poumon gauche. On connaissait approximativement sa taille - un peu moins de 1 m 60 -, sa pointure - 38 -, et son poids - près de 50 kilos. À présent, les scientifiques sont en mesure d'affirmer que l'homme des glaces, découvert en 1991 à 3 200 mètres d'altitude dans un glacier des Alpes italiennes de la province de Bolzano, était un beau brun aux yeux marron, de groupe sanguin O, qui digérait mal le lactose.

Ces précieuses informations inscrites dans l'ADN d'Ötzi ont été révélées grâce à de nouvelles techniques de séquençage génétique qui permettent de travailler à partir de très petits échantillons. Ainsi, en prélevant un peu de l'os iliaque gauche de la momie, vieille de plus de 5 300 ans, une équipe internationale de chercheurs, dont des Français du laboratoire CNRS d'anthropologie bioculturelle de Marseille, est parvenue à décrypter 96 % de son ADN nucléaire, plus "précis" que l'ADN mitochondrial révélé en 2008.

Des tatouages anti-douleur ?

Outre un portrait-robot plus complet d'Ötzi, les résultats de leur étude récemment publiés dans la revue Nature Communication éclaircissent un mystère qui avait intrigué les scientifiques. Comment un homme si svelte pouvait-il avoir des artères en si mauvais état ? En plein néolithique, notre Hibernatus avait fort peu de chances d'avoir été victime de la malbouffe ou encore de longues heures plantées devant un écran de télévision... Non, il avait en réalité une prédisposition génétique à l'artériosclérose et aux maladies cardiovasculaires. Une donnée intéressante au regard de l'épidémie actuelle.

Quant aux mystérieux tatouages qui avaient été observés au niveau de ses articulations, ils pourraient être le vestige d'une médecine... préhistorique. Au détour de leurs analyses, les scientifiques ont découvert chez l'homme des glaces 60 % du génome de l'agent infectieux, Borrelia burgdorferis, responsable de la maladie de Lyme, aujourd'hui encore transmise par les tiques. Il semble qu'Ötzi ait été atteint de ce mal qui provoque des douleurs articulaires intenses. Les dessins sur son corps pourraient donc avoir été placés là dans l'espoir de le soulager.

Une mutation génétique rare en Europe

Enfin, en comparant l'ADN de la momie à celui d'un peu plus d'un millier d'Européens actuels, les scientifiques ont fait une bien étrange découverte. Ils se sont aperçus que c'était avec les Corses et les Sardes qu'Ötzi, découvert à la frontière entre l'Autriche et l'Italie, avait le plus de similitudes génétiques. En particulier, son chromosome Y présente une mutation que l'on retrouve chez 9 % (nord de la Sardaigne) à 20 % (sud de la Corse) des hommes originaires de ces deux îles de la Méditerranée (contre à peine 1 % dans la population masculine européenne).

Que faisait-il alors à 3 200 mètres d'altitude en plein massif alpin ? Les scientifiques avancent deux hypothèses : soit notre Hibernatus était issu d'une lignée d'aventuriers venus de la mer Tyrrhénienne, soit ses caractéristiques génétiques étaient à l'époque beaucoup plus répandues en Europe et se seraient diluées sur le continent tandis qu'elles auraient subsisté dans ces deux îles. Une nouvelle énigme que les chercheurs ne manqueront pas de tenter d'élucider.