Image
En mettant fin au "califat de Bab Amr", Bachar a rendu service à tous les Syriens, toutes tendances et communautés confondues...
Le mur de la désinformation se lézarde un peu aussi en Allemagne, un pays pourtant otanisé politiquement et même collectivement. Ainsi un des très grands médias d'Outre-Rhin, Der Spiegel, vient de consacrer, le 26 mars, un reportage à un de ces combattants étrangers qui ont disputé Bab Amr à l'armée syrienne, et le portrait n'est pas très flatteur.

La correspondante à Beyrouth du Spiegel, Ulrike Putz, a rencontré en effet Hussein un extrémiste sunnite de 24 ans ayant fait partie de « pelotons d'exécution » de la rébellion de Homs, et ayant donc à ce titre tué plusieurs soldats tombés dans les mains de l'ASL. La rencontre s'est faite dans un hôpital de Tripoli au Liban, où cet Hussein est soigné pour une blessure de shrapnell au dos reçue au moment de l'offensive finale de l'armée sur Bab Amr.

La Tcheka de Bab Amr

Hussein raconte ainsi comment, dans un cimetière situé à l'ouest du quartier, certain soir ou certaine nuit de la mi-octobre 2011 - bien avant donc l'offensive finale de l'armée contre Bab Amr - il a été chargé d'exécuter un soldat accusé d »avoir tué des femmes « honorables« . Un homme capturé « par pure malchance » précise Hussein. Pour accomplir sa mission, Hussein a utilisé un couteau militaire. Il explique que sa victime agenouillée avait peur, bredouillait des prières ; Hussein lui a tranché la gorge, puis ses camarades de la « brigade d'enterrement » ont inhumé le corps. Cet égorgement était le « baptême du feu » d'Hussein jusque-là simple « enfouisseur » de cadavres. Il nie cependant avoir torturé des prisonniers, tenant à préciser, avec une certaine « candeur », que cette tache était dévolue à une « brigade d'interrogatoire« . Précisons que Hussein revendique son appartenance à la »brigade Farouq », une des « unités » les plus médiatisées de l'ASL, et qui a sévi à Homs jusqu'à la fin.

Au fait, d'où vient ce tueur ? Eh bien Hussein avant de faire égorgeur ASL, était « vendeur » : « Je peux tout vendre, de la porcelaine au yaourt ! »

Comme l'écrit Ulrike Putz, en une année de soulèvement les rebelles « ont perdu leur innocence« . Hussein justifie sa participation au soulèvement armé par la cruauté du régime. Et là, c'est, si l'on peut dire, presque « trop beau pour être vrai » : le jeune homme affirme que trois de ses oncles ont été « trucidés par le régime », l'un d'entre eux ayant même été tué avec ses cinq enfants ! Lui-même, Hussein, a été arrêté deux fois et torturé « pendant 72 heures« , pendu par les mains jusqu'à ce que sautent les articulations de ses épaules...

Qu'ils soient bidons, exagérés ou fondés, les griefs de Hussein envers le régime syrien n'empêchent pas que, comme l'écrit la journaliste allemande, ses activités à Homs tombent sous le coup de ce que l'ONG américaine Human Rights Wartch a récemment désigné comme « de graves violations des droits de l'homme émanant de la rébellion syrienne« . A ces accusations Hussein et ses camarades, blessés comme lui, de l'hôpital de Tripoli répondent qu'ils sont là pour « défendre le peuple » contre des « bouchers« . Et donc s'ils « pincent » un de ces « bouchers« , ils doivent « frapper fort » comme le dit un autre vétéran de Bab Amr, un certain Abu Rami. Justement, tant Hussein que Abu reviennent sur la « procédure pénale » en vigueur à Bab Amr entre l'été dernier et février 2012 : quand un homme du régime, soldat, notable ou chabiha leur tombait dans les mains, il était déféré illico devant une « cour martiale » présidée par le « commandeur » (mot militaire allemand) des rebelles de Homs, un certain Abu Mohamed ; Abu Hussein, chef du comité local de coordination (les CLC, structure d'opposition radicale) jouait les « assesseurs« , tandis que parfois d'autres « hommes » faisaient office de « jurés« . La « brigade d'interrogatoire » donnait communication des « aveux » des « prévenus« . Lesquels pouvaient aussi être confondus grâce à des vidéos de leurs atrocités figurant sur leurs propres téléphones portables. « De cette façon, explique Hussein, leur culpabilité était vite établie » (en effet !)

Les prisonniers déclarés coupables, ils étaient livrés à Hussein et à ses collègues de la « brigade d'enterrement« , qui les conduisait dans le cimetière, ou un jardin voisin. Et là Hussein sortait son grand couteau...

Les chouettes amis d'Edith Bouvier

Selon ses propres déclarations, le jeune homme a ainsi égorgé quatre hommes. Pourtant, au sein de l'équipe de bourreaux de Bab Amr, il était le plus inexpérimenté, ce qui aujourd'hui semble presque le gêner. Comme pour se revaloriser, il explique à la journaliste du Spiegel qu'il a été blessé quatre fois au combat à Homs, qu'il a servi une mitrailleuse - de fabrication russe - et que donc il a certainement tué « beaucoup plus d'hommes ». Et sa blessure n'a en rien diminué son zèle révolutionnaire : il confie à Frau Pulz qu'il espère sortir la semaine prochaine de l'hôpital pour retourner à Homs et là « les chiens devront rendre des comptes » !

La journaliste allemande s'est aussi entretenue avec un autre convalescent de l'hôpital de Tripoli, Abu Rami. Elle rappelle que cet homme en survêtement Adidas a été un des cadres dirigeants de la milice de Bab Amr - il semble bien qu'il soit le médecin aperçu dans les vidéos aux côtés d'Edith Bouvier, dans l'hôpital improvisé de Bab Amr, ou qui organise les obsèques nocturnes de la journaliste américaine Marie Colvin dans le cimetière de Bab Amr. Lequel Rami, note Ulrike Putz, est salué aujourd'hui encore avec respect par ses camarades de l'hôpital qui « boivent ses paroles« . Justement, écoutons Abu Rami évoquer son action passée : « Depuis l'été dernier, nous avons exécuté 150 hommes, qui représentent environ 20% de nos prisonniers« . Ceux qui n'ont pas été égorgés ont servi de monnaie d'échange avec des rebelles capturés. « Quand nous pincions un sunnite parmi les espions ou qu'un citoyen de Homs était pris en flagrant délit de trahison de la Révolution, on faisait un procès très court » précise Rami. Qui estime à 200 ou 250 le nombre de « traîtres » exécutés par la « brigade d'enterrement » de son jeune subordonné Hussein. Interrogé sur le point de savoir si tous les condamnés étaient vraiment coupables, ou si leur procès avait été équitable, Abu Rami répond que lui et ses amis se sont efforcés de bien faire les choses, mais, conclut-il, il est évident que « la Syrie n'est pas un pays pour les gens sensibles ! » Si lui-même le dit...

Voici donc quelque uns de ces sympathiques jeunes gens qui ont fait la loi pendant peut-être sept mois à Bab Amr. Des tueurs fanatiques qui avaient mis le quartier, et même Homs, à l'heure de l'arbitraire et de la mort, en une sorte de mix infernal de la terreur bolchévique des années vingt et du fanatisme salafiste. Voilà qui étaient les gens « admirables » avec qui Edith Bouvier et William Daniels ont passé des heures inoubliables ! Eh bien, on ne peut que se féliciter que l'armée syrienne ait mis durablement hors d'état de nuire cette racaille !

Qu'un tel reportage paraisse dans un très grand média allemand comme Der Spiegel prouve que la vérité est à portée de la presse mainstream, même dans un pays aussi américanisé que la RFA. Et il ne fait que d'avantage honte aux collègues français d'Ulrike Putz, qui ont maquillé ces bourreaux en victimes !

Pour les germanisants, le lien vers l'article du Spiegel :

http://www.spiegel.de/politik/ausland/0,1518,823382,00.html