Il y a quinze jours, je disais que la fin de l'euro pouvait débuter le 6 mai avec les élections en Grèce. Les résultats semblaient pouvoir donner une dernière chance aux partisans du mémorandum européen mais l'échec des négociations ont réveillé le volcan, pour reprendre le mot de Nicolas Dupont-Aignan.

Le suspens politique prend fin

Les résultats de dimanche dernier offraient une double lecture. D'un côté, les deux principaux partis favorables au plan européen (PASOK et ND) s'étaient effondrés, passant de 77 à 32% des suffrages en seulement trois ans, alors que les partis opposés devenaient majoritaires. Mais les règles électorales du pays (seuil de 3% pour obtenir des députés, prime de 50 sièges sur 300 pour le premier parti) laissaient planer un suspens sur l'issue du scrutin.

En effet, le PASOK et ND ont obtenu 149 sièges, à seulement deux sièges de la majorité absolue, qui pouvait être obtenue par l'addition des 19 sièges du DIMAR, un parti regroupant les dissidents plus modérés du SYRIZA, à gauche du PASOK. Après l'échec de la droite puis du SYRIZA, jeudi, le DIMAR semblait prêt à rejoindre le PASOK et ND dans un gouvernement favorable au plan européen, légèrement modifié. Mais cette possibilité est tombée hier.

En effet, le DIMAR a donné une fin de non recevoir au PASOK, ce qui devrait provoquer de nouvelles élections. Les premiers sondages indiquent que SYRIZA qui devrait prendre la première place à ND, donnant alors une nette majorité aux partis opposés au plan européen (mais ce parti n'est pas opposé à la monnaie unique). Du coup, une majorité devrait facilement s'organiser autour du Front de Gauche grec, sans les partis favorables au plan européen !

Vers l'épreuve de force

Ce bouleversement démocratique est porteur d'un changement complet de donne au niveau européen. Cela en serait fini des gouvernements obéissant sagement aux dirigeants européens, comme l'automne dernier, quand le premier ministre socialiste avait scandaleusement abandonné son projet de référendum sous la pression des dirigeants européens. De la sorte, le peuple grec se vengerait avec six mois d'écart, et la partie promet d'être extrêmement serrée.

Car il est bien évident que le nouveau gouvernement grec qui pourrait être issu de ces secondes élections ne sera pas du tout lié par les accords précédents et va formuler des exigences sans doute extrêmement fortes. Et on peut supposer que les créanciers de la Grèce, et l'Allemagne au premier rang, ne souhaiteront pas céder grand chose, sous peine de créer une forme « d'aléa moral » qui pourrait faire contagion. L'Allemagne ne voudra pas payer un centime de plus.

Que va produire cette épreuve de force ? On voit mal l'Allemagne céder aux probables revendications grecques. En revanche, la Grèce pourrait finir par être tentée par une sortie de la zone euro, aussi désordonnée soit-elle. Certes, tout ne sera pas rose, mais le redressement serait enfin en vue grâce à la dévaluation de la drachme, qui donnerait un coup de fouet au tourisme (16% du PIB) et aux producteurs locaux par rapport aux importations.

Finalement, le moment de vérité semble approcher pour la Grèce et la zone euro. Et ce serait un beau symbole que la démocratie grecque envoie au tapis cette construction artificielle et bureaucratique qu'est la monnaie unique, dont il est parfaitement possible de sortir.