Etienne Chouard
© InconnuDans le viseur du conférencier : « notre Constitution », écrite pour perpétuer les concentrations de pouvoir
Abstentionnisme record, défiance vis-à-vis des politiques, prise d'otage des questions de société : c'est face à ce constat que la cause du "pouvoir rendu aux citoyens" prend racine.

De passage à la Réunion pour une série de conférences, dont une mercredi soir à Saint-Paul, l'enseignant en économie et en droit Etienne Chouard sème, partout où il passe, l'espoir d'un renouveau démocratique : avec des élus tirés au sort.

Son discours est rôdé comme du papier à musique. Paris la semaine dernière, Bruxelles, Dublin ou Tunis bientôt, Etienne Chouard dispense sa bonne parole aux quatre coins du monde. Y laissant le secret espoir que des esprits attentifs soient au moins interpellés par son message.

Ses propos dépassent sans ménagement le politiquement correct : « Après 200 ans de ploutocratie, on pourrait dire " crapulisme ", de régimes politiques oligarchiques faits par les plus riches et pour les plus riches, cela a donné comme résultat des citoyens qui se sont habitués à suivre leurs maîtres, sans pouvoir rien faire ».

« Mais les élections sont faites justement pour agir comme une sentence pour un élu qui n'aurait pas fait son travail ? », demande-t-on naïvement. « On nous a abruti que les élections voulaient dire " démocratie " », répond-il. « Ce qu'on a voulu faire passer pour des citoyens ne sont que des électeurs. L'étiquette des partis est fallacieuse. L'UMP n'a rien de populaire, le PS n'a rien de socialiste. L'Assemblée est majoritairement composée d'affairistes. Ils sont nos maîtres et nous nous laissons faire ».

Un pouvoir tournant : seule parade à l'abus de pouvoir

Ces quatre vérités étant dites, que propose le conférencier pour pallier à cette crise de confiance en la politique. « Nous devons remonter à la cause des causes des injustices : notre Constitution est mauvaise chaque fois que ceux qui l'ont écrite avaient un intérêt personnel contraire à l'intérêt général », explique-t-il.

Selon Etienne Chouard, c'est aux citoyens d'édicter les règles d'une nouvelle constitution.
Etienne Chouard
© InconnuDe conférences en débats, Etienne Chouard répand cette théorie qui ne date pas d'hier
Elle serait écrite par des personnes désintéressées du pouvoir, et pour cause, le mandat d'un élu tel que nous le connaissons aujourd'hui serait tout simplement balayé. « Seule une Assemblée constituante désintéressée, donc forcément tirée au sort, sera un jour capable d'écrire une bonne Constitution proclamant les principes d'une véritable démocratie et instaurant les mécanismes de la souveraineté de chaque citoyen », préconise-t-il. En clair, Etienne Chouard reproche aux élites d'avoir elles-mêmes édicté les règles favorisant leur régénérescence perpétuelle.

Mais le procédé ne serait pas complet sans des contre-pouvoirs à tous les étages. Un seul exemple permet d'illustrer les limites du Parlement actuel. Les députés ou sénateurs sont eux-mêmes chargés de fixer leurs indemnités. Un non sens dans une 5e République qui fait des contre-pouvoirs l'un de ses piliers. « Ce n'est pas à ceux qui exercent le pouvoir d'écrire les règles qui doivent protéger les citoyens des abus de pouvoirs », clame le spécialiste.

Dans le modèle de démocratie que prône Etienne Chouard, des Chambres de contrôle sont greffées à chaque institution mais également aux banques. « L'élu aux multiples mandats que nous connaissons n'existe plus. C'est la théorie du tirage au sort qui s'applique. Cette théorie a été mise en pratique il y a 2500 ans et pendant 200 ans en Grèce, berceau de la démocratie. Les élus avaient des mandats courts, avec l'obligation de rendre des comptes à la fin de leur mandat », illustre-t-il. Le tirage au sort serait le seul moyen d'endiguer les concentrations de pouvoir, connivences et autres passations de pouvoir familial qui perdurent dans les collectivités et instances du pouvoir national.

« Evidemment, tout ceci paraît utopique mais la solution est en nous. Il faut un très gros travail de vulgarisation pour apporter cette possibilité à la conscience des gens. Pour ma part, je fais de mon mieux pour que ça émerge », conclut-il.

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