La santé des personnes seules serait plus fragile, selon une étude. En cause, le stress induit par la solitude. Un stress qui affaiblirait les défenses immunitaires des personnes isolées, et augmenterait le risque de développer un état inflammatoire chronique, susceptible d'engendrer des maladies graves.

La solitude est décidément mauvaise pour la santé. Si de précédentes études avaient déjà mis en évidence ce phénomène, une nouvelle étude vient d'en explorer en profondeur plusieurs mécanismes majeurs.

Quels sont les résultats livrés par cette étude, menée par des chercheurs de l'université de l'État de l'Ohio (Ohio, Etats-Unis) ? Ces chercheurs américains ont constaté que l'isolement social engendre un stress accru, lequel a deux conséquences : d'une part, un affaiblissement du système immunitaire, rendant ainsi que les personnes seules moins résistantes aux agressions extérieures. Et d'autre part, un risque accru de développer des pathologies graves comme des maladies cardiaques, le diabète de type 2 ou encore la maladie d'Alzheimer, via l'augmentation du risque d'inflammation chronique.

Pour obtenir ces résultats, Lisa Jaremka et ses collègues ont mené deux études distinctes. La première étude a consisté à mettre en évidence le lien entre la solitude, le stress et l'affaiblissement des défenses immunitaires. Quant à la deuxième étude, elle a permis de montrer l'existence d'une corrélation entre l'isolement social, la sensibilité au stress, et la propension à développer un état inflammatoire.

Chez les personnes socialement isolées, des défenses immunitaires plus fragiles

Au cours de la première étude, les chercheurs se sont intéressés au cytomégalovirus, un virus généralement bénin qui appartient à la famille des herpès virus, et qui infecte une grande partie de la population de façon persistante (dans les pays occidentaux, la prévalence du cytomégalovirus est comprise entre 30 et 60 %). Généralement, le cytomégalovirus reste à l'état dormant. Mais il peut parfois être réactivé, notamment en situation de stress, ce qui se traduit alors par une augmentation du taux d'anticorps dans le sang. Par ailleurs, sa réactivation est plus fréquente en cas d'immunodépression, c'est-à-dire lorsque les défenses immunitaires sont affaiblies.

Pour réaliser cette première étude, Lisa Jaremka et ses collègues ont réuni un groupe de 200 femmes ayant achevé avec succès un traitement relatif au cancer du sein. Les chercheurs ont tout d'abord soummis les volontaires au UCLA Loneliness Scale, un questionnaire fréquemment utilisé en psychologie pour mesurer, entres autres paramètres, le niveau d'isolement social des individus.

Puis les chercheurs ont cherché à savoir celles qui, parmi les 200 volontaires, étaient sujettes à une réactivation du cytomégalovirus. Pour y parvenir, les choses n'étaient pas si simples. En effet, même réactivé, le cytomégalovirus ne produit généralement pas de symptômes. Par conséquent, ausculter les volontaires à la recherche d'éventuels symptômes n'aurait servi à rien. Pour contourner ce problème, Lisa Jaremka et ses collègues ont décidé d'effectuer une analyse sanguine, afin de détecter la présence éventuelle d'anticorps contre le cytomégalovirus, signe d'une réactivation de ce dernier.

Résultat ? Les chercheurs ont découvert que les volontaires qui souffraient de solitude étaient plus souvent sujettes à la réactivation du cytomégalovirus que les volontaires entourées socialement. Ce qui suggère l'existence d'un lien entre isolement social et fragilité accrue du système immunitaire (en effet, comme vu précédemment, la réactivation du cytomégalovirus est plus fréquente en cas d'immunodépression).

Incidemment, ce résultat suggère aussi, et ce sans grande surprise, que la solitude est un facteur de stress. En effet, on l'a vu également plus haut, la réactivation du cytomégalovirus survient plus fréquemment chez les individus sujets au stress.

Un lien entre solitude et état inflammatoire

Quant à la deuxième étude, elle a porté sur deux groupes distincts de volontaires : un groupe de 144 femmes ayant survécu au cancer du sein issues du premier groupe, et un groupe de 134 adultes bien portants.

Tout d'abord, les scientifiques ont soummis le groupe des bien portants à un questionnaire analogue à celui auquel avait été soummis l'autre groupe, afin là encore d'évaluer le niveau d'isolement social de chaque volontaire.

Ensuite, les chercheurs ont soumis chaque volontaire à une situation stressante : ils ont en effet demandé à chacun d'entre eux de réaliser un discours improvisé de cinq minutes, puis de résoudre un exercice de calcul mental face à une caméra et trois membres de l'équipe de recherche. Pendant que les participants réalisaient ces tâches, leur composition sanguine était analysée.
Résultat : pour les deux groupes, le taux de cytokines, des protéines associées à une réponse inflammatoire de l'organisme, était plus élevé chez les personnes seules que chez les personnes entourées socialement, témoignant ainsi d'une plus grande sensibilité au stress.

Que déduire de ce dernier résultat ? Il montre que la probabilité de présence d'une inflammation est plus élevée chez les personnes seules. Problème : il est connu depuis longtemps qu'une inflammation chronique est associée à des risques graves, comme des maladies icônes coronariennes, le diabète de type 2, l'arthrite ou encore la maladie d'Alzheimer.

Ces travaux ont été présentés le 19 janvier 2013 lors de la conférence annuelle de la Society for Personality and Social Psychology, à la Nouvelle Orléans (Etats-Unis).