Tout le monde a en mémoire les remous provoqués dans la presse par l'émission censurée de Thierry Ardisson du 3 novembre 2001, « Tout le monde en parle ». Les invités étaient, entre autres, Karen Mulder et Ophélie Winter. Paradoxalement, la production décida de censurer ce dont tout le monde parla à l'époque.
Le 31 octobre 2001 a lieu l'enregistrement de l'émission au cours de laquelle Karen Mulder devait faire des révélations sur Elite. La prestigieuse agence de mannequin compte vingt-quatre succursales à travers le monde, six cents mannequins, et 99 millions d'euros de chiffre d'affaire. La BBC diffusa à la fin de l'année 1999 un reportage en caméra cachée sensé dévoiler l'exploitation sexuelle de jeunes mannequins et l'utilisation de stupéfiants dans ces milieux. L'affaire se finira par un arrangement judiciaire où la BBC fera son mea culpa. Pourtant Brenda Pola, la chroniqueuse du « Daily Mail » à la suite de la diffusion du reportage en question que « les révélations de cette émission ne font que confirmer ce que nous, journaliste de mode, soupçonnions depuis longtemps ; mais nous n'avions jamais pu en parler parce qu'il y a une conspiration du silence ».
Mais voilà que Karen Mulder brise cette conspiration et remet les supposées pratiques déviantes de l'agence au goût du jour en affirmant avoir été « violée par les dirigeants d'Elite »[1]. Il est nécessaire de préciser que avant de se rendre à l'enregistrement de l'émission, le célèbre top model a effectué courant octobre une série de dépositions au commissariat de la première DPJ (Direction centrale de la police judiciaire) mettant en cause un membre de son entourage ainsi qu'un certain nombre de personnalités qui, selon elle, l'auraient agressée sexuellement.[2]
Elle commença son interview en avouant avoir été violée par son père à l'âge de deux ans. « Je m'en suis rendu compte il y a quelques mois », et de poursuivre en expliquant que l'oubli de ses sévices était dû à l'état hypnotique dans lequel elle était plongée pendant qu'elle les subissait. C'est cette hypnose qui agita les forums et jeta le doute sur la crédibilité des propos de Karen Mulder. Il est théoriquement impossible de pratiquer quelque forme de violence physique que ce soit sur une personne hypnotisée. Mais faut-il encore que ce que Karen Mulder ait pris pour de l'hypnose en soit réellement.
A l'image de
Cathy O'Brien,
Brice Taylor, ou de
K. Sullivan[3], Karen Mulder est peut-être sujette à un programme de contrôle de l'esprit par traumatisme, et ce depuis son plus jeune âge. K. Sullivan raconte ce qu'elle a subi : « Plusieurs personnes entraînèrent, conditionnèrent puis brisèrent ma volonté et ma psyché, et me programmèrent à différents états altérés[4]. Mon père fut celui qui m'en fit subir le plus. Il le fit par la terreur. Il le fit par la torture. (...) J'ai été utilisée en enfant et en adulte dans ces états altérés de la personnalité, et il y en a eu plus d'un. Dans ces états je ne résistais pas. Je n'avais pas de colère. J'étais une esclave sexuelle totale et je faisais tout ce que l'on me demandait, quoi que ce fût. » Cet esclavagisme, dont les personnes qui le subissent sont appelées « mannequin présidentiel »[5], profiterait aux membres du gotha et aux hommes politiques de haut rang. Karen Mulder assure que Garou est au courant et que Ophélie Winter est, elle aussi, une victime de ces pratiques. D'après Emmanuel, l'un des spectateurs lors de l'enregistrement, et également l'auteur du mail qui a mis le feu aux poudres sur internet : « Elle (Karen Mulder) a dit qu'elle avait eu une discussion avec O.Winter au cours de laquelle cette dernière lui a dit : "ce que je vais te dire ce soir tu vas l'oublier. Demain tu l'auras oublié". J'en déduis tout naturellement que K. Mulder faisait là référence à l'hypnose pour ce qui est de l'oubli. On a tous compris que Karen avait mis en cause O.Winter. » Mais cette réflexion pourrait aussi masquer une autre réalité, celle que je viens de décrire ci-dessus, et qui consisterait à rétablir son « alter » par un élément déclenchant ou une reprogrammation adéquate.
Karen Mulder affirme également avoir été violée par le Prince de Monaco, et confirme que « des hommes politiques paient pour avoir la compagnie des filles d'Elite ! ». Ces révélations n'apprennent rien à ceux qui connaissent les habitudes du milieu comme le journaliste Ian Halperin, qui publia aux Etats-Unis en 1999 « Shut up and smile »(Souris et tais-toi !). On pouvait découvrir dans cet ouvrage qu'un directeur d'agence a « touché une commission de 40 000 dollars pour avoir envoyé un top à un magnat du pétrole ». On nous rappelait également qu'un journaliste de la chaîne CBS qui demandait en 1988 à un directeur d'une célèbre agence si il avait eu recours au viol et au chantage sexuel avec ses modèles, eu droit pour toute réponse à : « Je ne me souviens pas. Peut-être. C'est bien possible... »
Kate Moss dénonça les cocktails drogue-alcool qu'elle était encouragée à ingurgiter par son entourage, « du moment qu'elle restait tranquille et séduisante devant l'objectif ». A l'image de Karen Mulder, certains top model disparaissent de la circulation pour prendre du repos à coup d'antidépresseur, selon la version officielle, comme Naomi Campbell. D'autre, moins connus, et donc moins enclins à susciter la curiosité des médias, quittent le milieu, et notre monde, de façon « accidentelle » et définitive comme Paula Brenken, Emanuelle Dano, ou Patricia Davis.[6]
Les soupçons se confirment Le samedi 3 novembre c'est au tour de Philippe Berti[7] de recueillir les déclarations de Karen Mulder. Cette interview ne paraîtra dans la presse qu'au mois de janvier 2002. Celle-ci est troublante puisqu'elle va exactement dans le sens d'une manipulation du comportement initiée par un traumatisme, et réactivée par un élément déclencheur, conformément à la théorie évoquée plus haut. Il faut lire l'explication qu'elle fait de son état en se mettant à la place de quelqu'un qui vit cette expérience sans qu'on lui ait expliqué son mode opératoire : « Toute personne ayant de l'autorité et connaissant mon secret peut me manipuler. Tant que je n'avais pas évacué la terreur de mon enfance, n'importe qui, en me faisant peur, pouvait avoir une emprise sur moi ». Forts de la connaissance que vous avez maintenant des états altérés de consciences, avouez que cette phrase prend un autre sens que celui que vous lui avez donné quand vous l'avez découvert au début de ce texte. (Vous êtes rentré dans la matrice ☺ ).
Et la théorie se confirme dans la suite de l'entretien, lorsqu'elle participa au concours de l'agence Elite à 17 ans : « On a essayé de faire de moi une prostituée : c'était tellement facile, je ne me souvenais de rien, j'oubliais tout ». Ce que Karen Mulder explique par des trous de mémoires pourrait très bien correspondre à un changement de personnalités, puisque « les différentes personnalités, ou parties de la personnalité, appelées alters, peuvent être créées sans se connaître les unes des autres et prendre le contrôle du corps à des moments différents. Les murs d'amnésie qui sont construits par les traumas forment un écran assurant le secret sur l'identité des abuseurs et empêche la personne consciente d'avoir connaissance du système d'alters utilisé chez elle »[8]. Mais la méthode n'est pas infaillible, et une déstabilisation physique ou psychologique du sujet peut créer des ponts entre les différentes personnalités. En ce qui concerne Brice Taylor, c'est un accident de voiture qui fut l'élément révélateur : « J'ai commencé à avoir des flashes de souvenirs, comme une brèche ouverte entre un état de personnalité et un autre. » Pour Karen Mulder, ce fut lors de ses vacances à l'île Maurice où elle est « vraiment rentré dans la souffrance » et qu'elle a « eu les premiers flashs ».
Les souvenirs se précipitent. Les déviances des relations des Mulder ressembleraient à celles dont certains soupçonnent les membres du Bohemian Club à en croire la suite de ses propos : « En fait, tous les gens que ma famille fréquentait sont des pédophiles. C'est un cercle vicieux et aujourd'hui je le casse. »
Ce que vous auriez pris pour des élucubrations il y a encore peu de temps, prend aujourd'hui, à la lumière des explications qui précèdent, une toute autre dimension : « Il y a tout un complot autour de moi, depuis longtemps, ça concerne des gens dans le gouvernement, dans la police. Tout dans ma vie a été organisé ! Tout, tout, tout ! Je n'avais pas de volonté à moi. »
Un rebondissement inaperçu
Malgré toute la nébuleuse de soupçon qui règne autour de l'agence Elite, malgré la réitération des révélations de Karen Mulder par le biais d'au moins deux médias et non des moindres (« Tout le monde en parle » et « VSD »), malgré son dépôt de plainte pour viol et l'ouverture d'une information judiciaire le 20 novembre 2001, confiée au juge Jean-Pierre Gaury, Karen Mulder est internée.
Son hospitalisation est d'autant plus suspecte qu'elle est précipitée, ayant lieu quelques heures après l'interview de VSD, et qu'elle est réalisée à la demande de sa sœur, elle-même mannequin chez Elite. Elle sortira trois mois plus tard, début février 2002. Et pas plus tard que le 8 juin de la même année, elle présente son premier single (la reprise d'une chanson de Gloria Gaynor intitulée I am what I am) dans l'émission qui avait censuré ses propos, « Tout le monde en parle ». Elle remercie le présentateur de ne pas avoir diffusé l'interview diffamante, alors qu'elle l'avait quitté quelques mois auparavant, furieuse de ne pas avoir été confrontée à Ophélie Winter, en s'exclamant : « Je sais d'où vient le vent ! » Dans le cadre d'une soumission à un programme de contrôle de l'esprit, les contradictions de Karen Mulder sur une période de quelques mois pourraient s'expliquer autrement que par un simple état dépressif passager, comme s'est empressée de le faire croire sa famille
http://myreader.toile-libre.org/uploads/My_51aa60dd212f8.pdf
Interview du papa de notre cher Julian Casablancas.
Concours final de l'Elite Model Look à Nice.
Des dizaines de jeunes filles venues d'Amérique, d'Europe de l'Est ou d'ailleurs s'apprêtent à défiler.
Les quinze gagnantes signeront un contrat énorme avec Elite, première agence de mannequins au monde.
Les plus jeunes de ces concurrentes n'ont pas 14 ans.
Des gamines, peu au courant des réalités de la vie. Car tout n'est pas rose au royaume des lolitas.
Dans un reportage impitoyable, récemment diffusé en Grande-Bretagne, "MacIntyre, Undercover", la BBC dénonce les horreurs immorales de ce milieu.
Les journalistes de la chaîne anglaise ont filmé les coulisses des défilés pendant un an, à l'aide d'une caméra cachée.
Drogue, sexe, prostitution...
Leurs images sont accablantes.
On y voit des professionnels pervertir des mineures.
Une assistante propose de la cocaïne à une mannequin.
Un chaperon, supposé protéger les filles, se vante d'avoir eu des rapports sexuels avec 340 de ces jeunes modèles.
Le reportage montre qu'il s'agit souvent d'adolescentes naïves qu'on transforme trop vite en trophées.
Un contrat de 100 000 euros pour commencer, ça fait tourner la tête de ces jeunes filles dont beaucoup seraient prêtes à tout pour gagner le titre de "Top Model".
Dans "Top model", un livre paru en 1995, Michael Gross cite le témoignage de Cindy Crawford, peu après ses débuts: "Une fille, que je ne nommerai pas, grimpa en mini-jupe sur la table, sans petite culotte. Quant aux autres, elles étaient toutes assises sur les genoux de ces messieurs. Ce genre de petite fête, on y va une fois, ça suffit pour comprendre."
Le problème est, précisément, que toutes ne comprennent pas. Ou pas tout de suite. On ne peut pas oublier que la plupart des apprenties top models ont à peine une quinzaine d'années, quelquefois moins, quand elles sont introduites dans le métier. Savent-elles réellement quels désirs elles éveillent chez les hommes quand elles apparaissent à demi nues?
"Je n'ai jamais aimé engager les filles trop jeunes, car je trouve qu'on leur vole leur enfance. Mais la compétition est devenue telle qu'on est obligé de le faire", reconnaît Monique Pillard, directrice d'Elite à New York. "Pourtant, on accuse toujours les hommes de mal se comporter. Croyez-moi, il y a aussi des gamines qui n'ont aucun sens moral."
L'argument est facile: on accuse de provocation ces écolières que des hommes ont d'abord déguisées en vamps sexy et qu'ils ont entraînées, pour les défilés, aux gestes les plus forts de la séduction.
Alicia Moore raconte qu'elle s'est, toute jeune, retrouvée dans le lit d'un bisexuel et de son petit ami après avoir pris de l'ecstasy. "Nous avons fait l'amour pendant des heures, dit-elle, et j'ai appris le lendemain qu'ils étaient sans doute séropositifs. Je ne vous raconte pas combien j'ai eu peur!" Patricia Davis a eu moins de chance.
Convertie à l'héroïne dès l'âge de 14 ans, à l'époque de ses premiers défilés, elle est morte d'overdose.
Droguées et alcooliques, Paula Brenken s'est tuée en tombant par une fenêtre, et Emmanuelle Dano est morte, dans des circonstances encore plus mystérieuses, après un viol collectif.
Le reportage de la BBC montre un certain Diego, un "booker", c'est-à-dire une personne qui s'occupe de trouver des séances de photos pour une jolie fille, qui présente son image à des agences, qui prend "soin" d'elle. Diego raconte sans le moindre malaise qu'un verre d'alcool et un peu de cocaïne parviennent toujours à vaincre les réticences de toute fille de plus de 12 ans. Le mot de pédophilie le fait rire. Pour lui, toutes ces filles étaient consentantes. Des hommes comme lui reçoivent une commission chaque fois qu'ils emmènent une nouvelle fille dans un night-club, ils font des paris sur celles qu'ils séduiront et se racontent, en riant, leurs orgies sexuelles. La mannequin Jill Edwards se rappelle ses débuts de top model, à 15 ans, comme "un des pires cauchemars qu'on puisse imaginer". Dans "Shut up and Smile", un livre de Ian Halperin paru en Amérique en 1999, elle décrit les hommes qui travaillent dans ce milieu comme autant de violeurs. En février 1998, à bout de nerfs, elle a tenté de se suicider.
Les déclarations les plus explosives restent celles de Christine Bolster, mariée aujourd'hui à l'acteur Robert Davi. Découverte à 14 ans, elle a vécu six années avec Gérald Marie, un des grands patrons d'Elite. Dans le reportage de MacIntyre, c'est elle qui lui réserve les mots les plus durs. "Je me suis retrouvée, dit-elle, complètement folle au milieu de cette époque. Tout le monde se droguait..."
Les accusés peuvent se défendre: Dany Jucaud de Paris-Match interviewe John Casablancas, Créateur et président de l'agence Elite.
PARIS MATCH. Comment avez-vous réagi lorsque vous avez vu ce reportage de la BBC accablant pour Elite?
JOHN CASABLANCAS. Ça m'a rendu physiquement malade. Je vais demander une enquête pour voir si le montage de ce reportage a été objectif. Pour déterminer le véritable degré de responsabilité des accusés. Ce qui m'a le plus choqué, c'est la bêtise. Daniel Bianco, qui sert de chaperon aux filles, est le garçon le plus gentil de la terre. Les filles l'adorent. Il n'a jamais eu un geste déplacé envers qui que ce soit. Dans le reportage, il se vante d'avoir couché avec plus de 340 d'entre elles en dix ans... C'est impossible! S'il a eu trois fiancées en dix ans - pas des mannequins, d'ailleurs -, c'est le maximum. C'est de la pure fanfaronnade.
P.M. Comment expliquez-vous qu'Elite ait été prise comme cible?
J.C. Elite a dominé le marché pendant vingt ans. Nous avons 24 agences dans le monde. Nous restons la plus grande agence du monde. Nous sommes les plus attaqués dans ce film, pourtant le seul "crime" commis ne l'est pas chez Elite mais chez Marilyn Gauthier, quand on voit une bookeuse qui vend de la drogue. Ça, c'est un crime grave.
P.M. Ces pauvres filles sont souvent désarmées.
J.C. Il faut arrêter ça: il n'y a pas, d'un côté, de pauvres victimes innocentes et, de l'autre, les loups-garous qui les pervertissent! Ces filles, qui ont de 15 à 17 ans, n'ont pas froid aux yeux. Elles sont extraordinairement provocantes dans leur façon de s'habiller, de se maquiller, de parler.
P.M. Ce n'est pas une excuse. Une fille de 16 ans, aussi provocante soit-elle, est souvent naïve. En revanche, un homme de 40 ans qui a le pouvoir et qui en profite, ça s'appelle de l'"abus de pouvoir"!
J.C. C'est vrai qu'il y a des hommes qui se tiennent mal. Mais il n'y a pas qu'à Elite! Je reconnais que j'ai toujours eu tendance à être très libéral sur la sexualité. En revanche, je suis très strict sur la drogue.
P.M. Qu'est-ce que ce scandale va provoquer pour Elite?
J.C. C'est un coup terrible pour nous, mais il n'y a pas eu d'acte criminel commis. Chez Elite, les filles sont bien traitées. Elles sont extrêmement protégées: de leurs fiancés, de leurs parents qui veulent leur prendre leur argent, de tous les parasites. Monique Pillard, qui a créé l'agence avec moi il y a trente et un ans, est une véritable mère poule pour ses filles. Elle a une excellente réputation.
P.M. Quelles vont être à court terme les conséquences pour l'agence?
J.C. Elle est aujourd'hui comme un géant blessé, mais elle s'en sortira. Nous avons été coupables d'un certain laisser-aller entre les exécutifs et les mannequins. Nous allons établir des règles strictes à tous les niveaux de l'agence pour établir ce qui peut se faire ou ne pas se faire. Mais nous vivons dans un monde d'hypocrites. Même s'ils s'en plaignent, nos clients aiment que les filles soient très jeunes. C'est un milieu terriblement superficiel, une véritable jungle. Ce métier n'a honte de rien.
Source: Paris Match, 04.01.00
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