Il n'y a que deux moyens pour assujettir le peuple: le contraindre ou le tromper.

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La contrainte abuse toujours de sa violence. Elle franchit donc à terme la limite et finit par réveiller en nous des instincts de contestation capables de freiner l'efflorescence de son pouvoir.

La duperie jouit de l'invisibilité de pouvoirs plus efficaces: ceux que le marché polit méthodiquement pour mieux prospérer.

L'économie est une politique travestie. La consommation y structure le lien et le statut social. Ce ne sont ni les dieux ni les rois, encore moins les députés, qui font les lois. Ce sont les marchés. Les vrais tyrans sont les actionnaires. En outre nous devrions écrire: les marchés font le crime...

L'argent nous aveugle par l'éclat de sa dictature.

Celui qui la refuse ne peut le faire qu'en se marginalisant ou en s'isolant. Et je reste convaincu que la majorité des désoeuvrés, des sans logis, des miséreux le sont devenus non par résistance au système, mais parce que celui mis en place par le marché n'a pas voulu d'eux et les a ainsi mis au banc. Ce sont les non rentables, les maillons faibles.

Quant aux autres, comme l'a si bien dit Coluche transfigurant La Boétie : « Il suffit qu'ils n'achètent plus pour que ça ne se vende pas ». Mais, de même que les gouvernés préfèrent obéir pour exister, les consommateurs préfèrent avoir pour être. Preuve en est qu'ils ne leur en coûtent rien d'appeler « démocratie » une dictature financière leur offrant l'illusion du confort...Illusion préférée désormais au désir de liberté. La vie à crédit nous conviendra ainsi tant que nous pourrons consommer un bien-être supposé.

Renoncer à sa servitude reviendrait à refuser la vie en société. Très peu en sont capables et le prix de cette solitude se dépense dans l'anonymat le plus austère, pour ne pas dire le plus inhumain. Car ceux, comme nos indignés d'estrade, qui clament haut et fort qu'ils résistent ou qu'ils ne consentent pas, ne sont certainement pas ces anonymes qui ont su s'épanouir dans l'exil volontaire, loin de toute société, de tout pouvoir...