L'accueil de réfugiés syriens va de si bon train que certains des prochains arrivants se retrouveront « fort probablement » sur des bases militaires d'ici la fin du mois. Si le gouvernement fédéral se réjouit de voir qu'il parviendra à accueillir les 25 000 réfugiés souhaités d'ici la fin février, ses voisins américains s'inquiètent de cette arrivée massive et des risques qu'elle pourrait poser à leur sécurité de l'autre côté de la frontière.

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La tendance au « camps » pour les réfugiés syriens est de plus en plus utilisée partout dans le monde
Le gouvernement libéral avait prévenu que certains réfugiés syriens pourraient être envoyés sur des bases militaires à leur arrivée au pays, faute d'autres logements temporaires, mais cette possibilité était toujours présentée comme un dernier recours. Or, le ministre de l'Immigration et des Réfugiés, John McCallum, a nuancé son propos mercredi : il ne serait « pas du tout surpris si, la semaine prochaine ou la suivante », Ottawa devait avoir recours aux bases de Valcartier ou de Kingston. « Il est difficile de savoir quand on aura besoin de ces endroits, et si oui, pour combien de temps. [...] Mais il y a de grandes possibilités qu'on en ait besoin avant la fin de cet exercice. »


Commentaire : La solution aux problèmes engendrés par la crise des migrants serait d'apporter la paix en Syrie en arrêtant totalement les combats, puis de reconstruire le pays pour que les réfugiés puissent enfin rentrer chez eux. Les syriens serait-ils devenus un peuple sans patrie ? Un camp militaire pour les y parquer n'est pas de meilleur augure et rappelle de biens mauvais souvenirs...


La base militaire de Valcartier peut accueillir jusqu'à 2000 réfugiés syriens — qui seraient logés à l'écart des Forces canadiennes et de leurs activités —, tandis que la base de Kingston peut en loger 700. Le ministère de l'Immigration et des Réfugiés ne s'attend pas à ce que toutes ces places soient réquisitionnées et les familles n'y resteraient « que quelques semaines ».

De l'avis des groupes d'intervenants, loger ces réfugiés de façon temporaire sur des bases militaires n'est « pas idéal ». « Mais bon, si on ne peut pas faire différemment, c'est sûr qu'il vaut mieux ça que ne rien faire du tout », a réagi Stephane Reichhold de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes.

Les libéraux se sont engagés à accueillir 25 000 réfugiés syriens d'ici la fin du mois. Mercredi matin, 15 685 réfugiés syriens étaient arrivés au pays — 5468 parrainés par des organismes privés, 9088 par le gouvernement et 1129 en vertu de parrainages mixtes entre le fédéral et le privé.

Mais ce blitz d'accueil fait sourciller au sud de la frontière. Un comité du Sénat américain s'est justement penché mercredi sur le programme d'accueil du gouvernement canadien. Afin de s'assurer, a expliqué le sénateur républicain Ron Johnson, qui préside le comité, que le Canada ne prenne pas de « raccourcis » en matière de sécurité en acceptant ces milliers de réfugiés. Son comité a reçu une lettre de l'ambassadeur canadien à Washington, citant les vérifications menées par le Canada en amont et notant que ces réfugiés ne seront pas citoyens canadiens avant plusieurs années et devront donc obtenir un visa pour entrer aux États-Unis.

Diplomatie insuffisante

Mais le gouvernement n'a pas dépêché de représentants au comité. Une erreur, selon l'opposition. « On n'en fait jamais assez pour rassurer notre partenaire américain, parce que la qualité de notre relation est déterminante tant pour notre commerce que pour maintenir la fluidité de notre frontière », a martelé le conservateur Steven Blaney, en déplorant qu'Ottawa n'ait pas envoyé d'experts des ministères des Affaires étrangères, de l'Immigration et de la Sécurité publique pour dissiper les craintes.

Le ministre McCallum estime que ce n'était pas nécessaire. Lui et son collègue de la Sécurité publique Ralph Goodale ont discuté avec leurs homologues américains, qui se sont montrés «satisfaits du processus que nous avons suivi ici » et qui « n'ont pas donné d'objection ». Une partie de la population ou du Sénat n'est peut-être pas du même avis, mais le gouvernement de Barack Obama « appuie ce que nous faisons », a souligné M. McCallum. « Nous sommes redevables à cette Chambre, et pas au Sénat des États-Unis », a renchéri le ministre Goodale aux Communes.

Le chef du NPD, Thomas Mulcair, n'a pas voulu « embarquer dans une campagne de peur ». Il s'est dit « fier » que le Canada fournisse sa part d'efforts et a bon espoir que le fédéral sache collaborer avec les Américains pour « veiller à ce que la frontière soit étanche ».