Brexit

Commentaire : Une remise en contexte intéressante, mais est-ce que le Brexit n'aurait pas été autorisé par les élites pour lui imputer une catastrophe économique à venir ?


La Grande-Bretagne a voté positivement afin de rejoindre la zone de libre échange européenne en 1975. Cette zone portait alors le nom de Common Market, Marché Commun. C'était ce qui était écrit sur les bulletins de vote. Beaucoup de Britanniques ont donc voté pour ce qui se présentait comme une zone de Libre Echange, profitable pour tous les participants, selon les théories économiques dominantes. Certains hommes politiques avisés ou plus perspicaces ont, dès cette époque fait valoir qu'il s'agissait d'un piège. Ils ont expliqué que derrière cette zone de libre-échange se cachait un projet politique d'intégration, dont le terme final était la création d'un super Etat Fédéral. Les citoyens n'y ont guère prêté attention à l'époque, confiants qu'ils étaient dans leurs élites politiques qui leur disaient que les opposants au projet déliraient.

Au fil des années, et dès le milieu des années 80, la Vérité est apparue, même aux yeux des plus naïfs, un à un les pouvoirs ont été transférés à Bruxelles, et quand ils n'ont pas été transférés, c'est Bruxelles qui se les est octroyés, de façon régalienne. Il faut savoir que Bruxelles s'est doté d'une bureaucratie considérable qui constitue une véritable caste, avec des « thinks tanks », des budgets et des accès privilégiés aux sources d'information et de diffusion. Cette classe s'est constitué un authentique capital, c'est le mot et la réalité, puisqu'un capital c'est ce qui donne le droit de commander et de prélever et ces capitalistes que l'on doit en fait appeler ces capitalo-socialistes, ont noué une alliance triple avec d'abord le très grand patronat internationalisé et ensuite avec la classe des politiciens professionnels.

Tout cela s'est fait silencieusement, en catimini car Bruxelles, à la faveur de son alliance avec certains intérêts des milieux d'affaires a corrompu les médias, occulté les évolutions et ainsi étouffé tous les débats. Tout cela s'est fait de façon subreptice jusqu'au jour ou, la population s'est réveillée, a pris conscience de ce qui se passait. La prise de conscience n'a pas été idéologique, elle a été pratique : les gens ont souffert dans leur vie quotidienne. Un besoin d'une nouvelle expression politique s'est manifesté et le besoin, la fonction, ont créé l'organe. Tout ce qui est décrit pour la Grande-Bretagne est valable pour les autres pays européens, moyennent quelques adaptations locales.

Le peuple a commencé à voter pour des partis et des représentants qui ne cachaient ni leur euro-scepticisme, ni leur opposition au transfert des pouvoirs nationaux à des personnes et institutions non élues, qui se comportaient comme des planificateurs et des dirigistes de plein pouvoir.

Il a fallu longtemps pour que cette prise de conscience s'effectue, et ce sont les diverses crises qui se sont succédé, qui ont peu à peu, concrètement, pratiquement ouvert les yeux. Les Britanniques se sont un jour réveillés avec le sentiment que leur possibilité de se gouverner eux même avait disparu, qu'elle avait été rognée, saucissonnée, puis quasi annihilée.

Les citoyens se sont rendu compte d'une part du fait que leur souveraineté leur avait échappé et d'autre part et cela est encore plus grave que l'establishment, les élites étaient passées de l'autre côté, du côté de Bruxelles et de ses fonctionnaires. Les citoyens se sont révoltés et ce n'est bien sûr pas un hasard, si ce sont les courants dits nationalistes qui ont profité de cette rébellion et si symétriquement, les partis traditionnels ont du se dévoiler comme étant, anti-nationaux, c'est à dire pro-UE, pro-Bruxelles.

Il ne faut donc pas s'étonner ou s'offusquer si, le bi-partisme étant incapable de prendre en compte les souhaits et les griefs de la population, la situation politique s'est disloquée, embrouillée: faute d'être prises en compte les demandes des électeurs se sont trouvées canalisées vers des partis que l'establishment s'est empressé de stigmatiser comme extrémistes ou populistes. Le vote populiste ou le vote extrémiste est un vote de classe, au sens marxiste, la classe des « laissés pour compte », la classe « left behind ». Cette classe a de moins en moins à perdre car elle n'a plus rien, plus d'avenir.

On remarquera que c'est un phénomène mondial ; comme si il y avait eu concertation, comme si les élites globalisées avaient décidé en commun de rejeter les revendications populaires et choisies, ensemble, de lutter contre elles en les dévalorisant, en les mettant hors du jeu politique par des qualificatifs infamants. Cela est vrai en Europe Centrale, en France, en Italie, aux USA, et maintenant en Grande-Bretagne. La concomitance de ces choix laisse, à juste titre planer un doute sur leur spontanéité. Il ne faut donc pas s'étonner si cette concertation ou coïncidence mondiale donne, produit un essor des thèses conspirationnistes, tout se passe en effet comme si, face au mécontentement des peuples, les élites s'étaient concertées pour offrir la même parade. Cette coïncidence a produit la recrudescence des interprétations conspirationnistes de l'histoire.

Il ne faut pas s'étonner si, les revendications populaires n'étant pas prises en compte par les partis traditionnels, ce sont des partis nouveaux qui s'en emparent. Il ne faut pas s'étonner si, les fonctionnaires et les administrations s'étant rangées du côté des élites européistes, les partis nouveaux, populistes, prennent le parti de critiquer les administrations et le phénomène vaut bien sûr également pour la presse et les médias institutionnels; ils sont rejetés et critiqués car ils ont eu le tort de sortir de la normale neutralité qui aurait dû être la leur. Ainsi se trouve réalisée une coupure de plus en plus profonde et entre les corps sociaux, les sociétés se clivent, les consensus se brisent, en raison des choix scandaleux de certaines institutions qui auraient dû rester neutres. Nous évoluons vers un système « bloc contre bloc ».

La violence encore largement verbale à ce stade, a pour origine, la constitution d'un large front européiste qui prétend utiliser, détourner les appareils d'état nationaux à son profit et pour défendre ses options, contre ceux-là même qui financent ces appareils d'état. Le peuple a compris que la coalition européiste s'accaparait un bien public et ceci sera lourd de conséquences à l'avenir. Le dialogue va devenir impossible.

La question de l'euro ne concerne pas directement les Britanniques, mais bien sûr elle les touche indirectement car elle conduit les pays de l'Eurozone, Bruxelles et les Allemands a être de plus en plus exigeants et directifs. En particulier dans le domaine sacré, réservé des Britanniques, la finance. L'Europe est de plus en plus interventionniste en ce domaine, avec la réglementation bancaire, les contrôles, la surveillance etc.

Les Britanniques vivent de finance. Ils ont besoin absolu de liberté. Ils importent quatre fois plus qu'ils n'exportent ! Ils importent l'essentiel de ce qu'ils consomment, ils sont largement déficitaires, mais ils équilibrent leur système grâce à la finance, grâce aux revenus et commissions, grâce aux investissements directs, grâce au Hot Money qu'ils attirent.

L'Europe s'est orientée vers une voie très préjudiciable aux Britanniques, malgré les quelques exceptions accordées. Depuis le début, les Britanniques considèrent que l'euro est une ineptie qui n'avait comme objectif que d'échouer et de profiter de l'échec pour forcer les participants à abandonner leur souveraineté. L'euro, ils l'ont dit dès le départ, ne pouvait qu'échouer sauf à être un piège, le piège qu'il est actuellement. Une nasse pour les participants. On ne peut faire vivre une monnaie sans politique fiscale commune, sans prêteur de dernier ressort et sans mandat démocratique, lequel garantit le soutien populaire, l'euro n'avait rien de tout cela, donc il était un « faux nez ». Un leurre, cela n'a guère renforcé les sentiments européistes au sein de la classe moyenne !

Une zone de libres-échanges n'a nul besoin d'une Union politique, et les Britanniques étaient d'accord sur ce point, mais une zone monétaire rend l'Union politique obligatoire et la question centrale se pose donc maintenant, car l'Union monétaire défaillante oblige à aller vers toujours plus de dirigisme, de contrôles et de pouvoirs centraux.

En fait les Britanniques, tout en étant en dehors de l'Eurozone monétaire, sont au pied du mur. En vertu de la contradiction initiale de sa position, la Grande-Bretagne est entre deux chaises, sa position actuelle est en pratique intenable. C'est aussi de cette façon qu'il faut comprendre le débat sur le Brexit : le maintien en l'état est une illusion, un mensonge, l'Union va s'approfondir sauf à se saborder et la question qui se pose aux Britanniques est de savoir s'ils acceptent de s'embarquer dans cette galère.

Le peuple, celui qui s'est rallié au populisme a pris conscience de tout cela :
  • de la progression considérable des inégalités et de la régression sociale et statutaire des classes moyennes
  • du rétrécissement continu du champ démocratique, ce champ se réduit comme peau de chagrin, les peuples étant dépossédés de leurs possibilités de choix
  • de l'asphyxie de la double souveraineté nationale et populaire et de ses possibilités d'expression
  • du fait qu'en réalité, malgré les promesses, l'Europe, ce sera toujours plus, plus de tout ce qu'il refuse.
Le mécontentement a été complété et amplifié par la peur, l'angoisse du lendemain, la peur de déchoir et bien entendu par les erreurs des élites domestiques, européennes et mondiales.

Les élites ont failli comme en témoignent le chômage, la spéculation universelle, la corruption, la chute des niveaux de vie; la multiplication des conflits guerriers, l'insécurité du terrorisme ; l'avilissement des mœurs, la disparition de la conscience morale.

Le peuple ne voit aucun bénéfice à l'ouverture et à la mondialisation, son niveau de vie régresse, ce sont les autres, toujours les mêmes qui tirent profit de l'ouverture mondiale et de l'intégration. Le peuple britannique récuse formellement, comme les autres peuples européens touchés par la crise, le « prioritarianisme cosmopolite »; il veut le retour à la préférence nationale.

Le peuple voit la misère gagner chez lui, chez ses enfants, et ses voisins, alors qu'il paie ses impôts et qu'il constate que ce sont les autres, les étrangers lointains qui bénéficient des aides qu'eux-mêmes financent. De ces aides qu'ils financent et qui les appauvrissent.

Bien entendu, toute cette division, cette violence sociale s'est trouvée exacerbée par les questions géopolitiques d'abord, le terrorisme ensuite et l'explosion de l'immigration enfin.