En 2016, plus de 450 personnes ont été victimes d'attaques à l'acide dans la capitale britannique - près de trois fois plus qu'en 2014. Le gouvernement entend criminaliser la possession sans raison de substances corrosives dans l'espace public.
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© Inconnu

Le livreur Jabed Hussain était arrêté à un feu rouge, à Londres, quand deux hommes ont aspergé son visage d'acide avant de lui voler sa mobylette. Un phénomène en forte progression dans la capitale britannique et qui inquiète de plus en plus. « S'ils voulaient prendre ma moto, ils avaient de nombreuses armes à disposition [...] Pourquoi ont-ils choisi l'acide ? », s'interroge-t-il, de retour avec l'AFP sur les lieux de l'agression, survenue un soir de juillet à Hackney, dans l'est de Londres.

Le jeune homme, encore très choqué, se rappelle avoir senti « une brûlure » sur son visage qui ne présente aujourd'hui pas de cicatrices, grâce à la protection offerte par son casque de moto.

Un livreur de pizza s'en est moins bien sorti début novembre : l'attaque, survenue dans le nord-est de la ville alors que la visière de son casque était relevée, lui a gravement brûlé les yeux et le visage.



Commentaire : Londres, capitale par excellence des caméras de surveillance ... et dans cette image on ne voit pas le visage du suspect. Qu'est-ce à dire ? Que les caméras de Londres ne sont pas si "efficaces" que cela ?


Les deux hommes comptent parmi les nombreuses victimes de ce genre d'attaques, en nette progression ces dernières années : 166 en 2014 puis 261 l'année suivante et 454 en 2016. Surtout localisées dans l'est de Londres, elles sont principalement le fait d'adolescents ou de jeunes âgés d'une petite vingtaine d'années, mus par des motivations variées - vols, règlements de compte ou encore bagarres.

Le gouvernement compte criminaliser la possession sans raison de substances corrosives dans l'espace public

Jaf Shah, qui dirige l'association londonienne Acid Survivors Trust International, attribue cette recrudescence à la faible législation en vigueur pour encadrer l'achat d'acide. Il faut aux victimes « beaucoup de force pour se remettre », au vu de la nature de leurs blessures, souligne-t-il, se félicitant d'une amorce de prise de conscience des autorités.

En octobre, la ministre de l'Intérieur Amber Rudd a annoncé vouloir criminaliser la possession sans raison de substances corrosives dans l'espace public, à l'exemple de ce qui a été instauré pour lutter contre le fléau des agressions au couteau. Elle veut aussi une licence autorisant l'achat d'acide sulfurique hautement concentré.

Dès juillet, le député d'opposition travailliste Stephen Timms avait plaidé devant le Parlement pour un changement de législation, à la suite d'une série d'agressions dans sa circonscription d'East Ham, notamment celle de deux cousins qui avaient été grièvement brûlés alors qu'ils étaient assis dans leur voiture. « On ne peut pas permettre une situation où les gens ont peur de se balader dans les rues [de Londres] », dit-il à l'AFP. Selon lui, ces attaques pourraient être liées aux gangs, lesquels constituent « un problème croissant depuis trois ou quatre ans ».

Vies détruites

Dans son secteur, les autorités de l'arrondissement de Newham ont demandé aux commerçants de refuser de vendre de l'acide aux jeunes s'ils suspectent un possible usage violent.

La police londonienne procède quant à elle à des confiscations dans la rue, mais le commandant Simon Laurence en appelle aussi aux parents, enseignants et travailleurs sociaux. « La police ne peut mettre fin à ça seule, nous avons besoin de l'aide de la communauté », dit-il à l'AFP devant le Mangle, discothèque où 22 personnes ont été blessées en avril par le jet d'une substance acide. « Cela a fait fondre leur peau et provoqué des douleurs atroces. Certains ont subi des blessures si graves qu'elles se rappelleront à eux pour toujours », raconte-t-il. Un homme de 25 ans a été condamné pour cette agression.

Les patrouilles de police ont commencé à s'équiper de kits permettant d'apporter les premiers soins aux victimes mais aimeraient aussi pouvoir tester les substances confisquées directement dans la rue.

« Ce que nous devons améliorer, c'est notre capacité à identifier le contenu d'une bouteille quand quelqu'un en transporte une », explique Simon Laurence.