La couverture vaccinale des résidents d'Ehpad s'élève à ce jour à 87,8 pour cent sur l'ensemble du territoire, et les dernières données montrent que seuls 55 pour cent des professionnels des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des unités de soins de longue durée (USLD), ont reçu au moins une dose de vaccin contre le Covid-19. Seraient-ils récalcitrants ? On se demande bien pourquoi...
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Sur la base de ces chiffres, Olivier Véran, ministre de la Santé, et Brigitte Bourguignon, ministre de l'Autonomie, se sont fendus d'une lettre envoyée à tous les directeurs d'Ehpad :
« C'est insuffisant et ce n'est pas une situation normale au regard de la fragilité des résidents dans un contexte de menaces liées à l'apparition et à la diffusion de certains variants préoccupants. »
La lettre leur annonce qu'une obligation vaccinale serait mise en place à la rentrée de septembre si le taux de vaccination des soignants n'atteignait pas 80 pour cent. Le propos est clair ; ils souhaitent que
« d'ici le mois de septembre, au moins 80 pour cent des professionnels des Ehpad et des établissements de santé aient reçu au moins une dose de vaccin. [Sinon], nous ouvrirons la voie d'une obligation vaccinale pour les professionnels de santé, conformément aux récentes recommandations du conseil d'orientation de la stratégie vaccinale. »
Entre soi, on ne peut être que d'accord !

Les deux ministres rappellent qu'un schéma vaccinal complet
« prend au moins cinq semaines [et que c'est donc] maintenant qu'il faut se faire vacciner massivement pour éviter le rebond épidémique. »
Pour aider les directeurs d'Ehpad à convaincre leurs salariés récalcitrants, le gouvernement va mettre à leur disposition un kit d'outils et des supports de communication « dans les tous prochains jours. »

Les gestionnaires d'établissement sont invités à « organiser des séances de vaccination sur site pendant l'été », lesquelles pourront également être ouvertes aux personnels des Saad (Services d'aide et d'accompagnement à domicile) et des Ssiad (Services de soins infirmiers à domicile) et autres établissements médico-sociaux du territoire.

Lors de la séance de questions au gouvernement, ce 30 juin au Sénat, le Premier ministre, faisant référence aux contaminations dans un Ehpad des Landes, s'est dit
« choqué de voir le nouveau variant se réintroduire, par l'entremise de celles et ceux dont c'est la vocation de protéger et soigner les résidents. Ce n'est pas admissible. »
On se demande bien comment il a pu établir cette connexion directe, mais il est vrai qu'il n'est plus à ça près.


Le ministre de la Santé peut-on encore vraiment l'appeler ainsi ? ajoute :
« Je ne peux pas prendre le risque d'avoir des vagues de Covid dans les Ehpad, d'être obligé de refermer les Ehpad, d'être obligé de dire à des dizaines, des centaines de milliers de personnes âgées qui n'ont rien demandé qu'elles ne peuvent plus voir leurs familles, qu'elles ne peuvent plus sortir, et compter les malades et les victimes dans les Ehpad parce qu'il y aurait une peur qui n'aurait pas pu être combattue et vaincue. »
La peur, on sait d'où elle vient. Et pour appuyer ses dires il faut dire qu'il en a besoin ! le ministre a cité l'obligation vaccinale contre l'hépatite B pour travailler à l'hôpital ou encore celle contre la fièvre jaune pour se rendre en Guyane.

Cette obligation vaccinale contre le Covid pour les soignants témoigne d'une évolution très attendue et « téléphonée » du gouvernement sur la question. Rappelons que, en novembre, Emmanuel Macron avait indiqué qu'il n'y aurait pas de vaccin obligatoire en France, et qu'il avait corrigé le tir en avril, en précisant que le vaccin ne serait pas obligatoire « à ce stade ». On devrait bientôt changer de stade, s'il faut en croire les nouvelles alarmantes fabriquées de toutes pièces.

Il existe donc un agenda de la vaccination obligatoire en France, amené selon la technique du « curiaçage » ou des « petits pas », tant bien que mal, par le gouvernement. Mais cette opération a-t-elle une chance de fonctionner ?

Véran et ses calculs mathématiques douteux

Comme nous l'indiquions hier, les ministres annoncent que le taux de vaccination chez les soignants des Ehpad et des établissements de santé doit atteindre 80 pour cent à la rentrée de septembre, sans quoi, l'obligation vaccinale sera instaurée. Le chiffre ne manque pas de surprendre, car il ne correspond à rien, sinon au fantasme d'un bureaucrate qui ne connaît rien à la réalité.

Les effectifs des Ehpad, à la différence des hôpitaux, sont en effet très dispersés. Certains établissements comptent parfois une escouade de personnels, d'autres une petite centaine. La proportion de 80 pour cent des personnels vaccinés est globale. Et que fera Véran si le taux de 80 pour cent est atteint, mais avec des établissements vaccinés à 100 pour cent, et d'autre vaccinés à moins de 50 pour cent ?

Si l'on se souvient que le taux de vaccination chez les soignants ne dépasse pas les 55 pour cent, l'atteinte des 80 pour cent paraît très peu probable.

On attend donc avec impatience le passage à l'acte, et l'on verra à quel point l'obligation vaccinale sera respectée dans les Ehpad.

Véran courageux, mais pas téméraire

Il est particulièrement significatif de voir qu'Olivier Véran cible le personnel des Ehpad en particulier, établissements souvent privés, mais prend bien garde à ne pas cibler, pour le moment, le personnel des hôpitaux publics, sur lequel il a une autorité directe. Fais ce que je dis, mais ne fais pas ce que je fais.

Il pourrait y avoir une raison cachée à ce choix stratégique d'imposer des règles aux établissements hors de son champ naturel, et d'épargner ceux qui dépendent directement de lui : Véran sait qu'une vaccination obligatoire des soignants dans les hôpitaux publics créerait une hémorragie des personnels et soulèverait une véritable fronde où il perdrait la face ; et ça, il ne le veut pas, plus que toute autre chose tant son ego est démesuré ! L'hostilité ou la défiance des personnels soignants envers un « vaccin » vanté par des médecins souvent méprisants et autoritaires est très forte. On ne pouvait mieux illustrer la fracture managériale, sociale, politique, entre soignants et médecins dans les structures publiques.

La réalité est que la moitié du pays celle qui n'est pas vaccinée est désormais gonflée à bloc contre les mesures liberticides prises par le gouvernement sous le prétexte du Covid... Et la caste au pouvoir sait qu'elle n'est pas en position de force pour faire boire ces millions d'ânes qui n'ont pas soif.

Le fichage des non-vaccinés commence

La pression commence donc à se faire sentir sur le petit peuple des non-vaccinés qui n'est pas encore converti à la nouvelle religion dominante. L'évangélisation ne devrait pas tarder !

Ainsi, il paraît que « les médecins généralistes » ont demandé à disposer de la liste de leurs patients non-vaccinés pour les contacter. Quels médecins généralistes ? Personne ne semble le savoir, mais le ministre de la Santé leur a néanmoins garanti un accès à ces listes.
« On demande des listes de patients depuis longtemps : pour vacciner contre la grippe, pour dépister le cancer du sein ou du colon... A chaque fois, on nous a objecté que la Commission nationale informatique et libertés ne l'autoriserait pas. Maintenant, on va enfin obtenir gain de cause. »
Cette phrase d'un représentant du CSMF, l'un des syndicats de médecins généralistes, en dit long sur l'opportunité que le Covid offre de fouler au pied la protection des données individuelles assuré jusqu'ici par la Cnil.

Devant un tel déni de démocratie, on peut que s'interroger sur l'instrumentalisation du Covid par les partisans d'un contrôle massif de la population, animés d'un délire collectif au mépris des libertés individuelles.

La vaccination cristallise les fractures françaises

La question de la vaccination n'est pas seulement une question sanitaire. Elle est surtout devenue une question politique. Elle est le terrain d'affrontement larvé entre deux France. La France des vaccins est très largement celle de la verticalité, de la croyance au progrès par la science, de la domination par la caste. La France qui ne se vaccine est celle de la périphérie, de la défiance vis-à-vis de l'autorité, de la préférence pour l'ordre spontané et pour l'acceptation du destin.

Entre ces deux France, on sent bien que l'écart se creuse, et que la tension monte. Sans très bien savoir jusqu'où la défiance peut aller.

Voir aussi cette interview de Michel Maffesoli, sociologue, sur L'ère des soulèvements (éditions du CERF), son dernier livre dans lequel il expose sa vision des voies que le changement de civilisation que nous connaissons pourrait suivre. Une interview où il est question de soulèvements populaires, de saturation de l'idéal démocratique et de sang qui coule.


Sources de l'article : Le Courrier des Stratèges & Le Médical social & Caducée.net
Lettre d'Olivier Véran et Brigitte Bourguignon aux Ehpad, au format Pdf