Un trou noir à 1500 années-lumière
Ces nouvelles observations s'intégraient dans une campagne plus large visant à identifier les compagnons dormants d'étoiles de notre galaxie. Pour ce faire, une équipe dirigée par l'astrophysicien Kareem El-Badry, du Max Planck Institute for Astronomy, s'est appuyée sur les données de l'Observatoire Gaia de l'Agence spatiale européenne (ESA). Depuis plusieurs années, cette mission mesure les positions, distances et mouvements de près d'un milliard d'objets de notre galaxie, de quoi construire le catalogue spatial 3D le plus précis jamais créé de la Voie lactée.
Pour ces travaux, les chercheurs se sont concentrés sur les 168 065 étoiles du Gaia Data Release 3 (GDR3) qui semblaient avoir des orbites à deux corps. Très vite, ils ont jeté leur dévolu sur un candidat particulièrement prometteur, une étoile jaune semblable au Soleil (de type G) située à environ 1 500 années-lumière désignée Gaia BH1. Sur la base de son comportement orbital, l'équipe a déterminé que cette étoile devait avoir un compagnon binaire, probablement un trou noir.
« Les données de Gaia nous montrent la façon dont l'étoile se déplace dans le ciel, traçant une ellipse en orbite autour du trou noir », détaille l'astronome. « La taille de l'orbite et sa période nous donnent une contrainte sur la masse de son compagnon invisible : environ dix masses solaires ».Pour confirmer leurs observations, les chercheurs ont ensuite analysé les mesures de vitesse radiale de l'étoile à partir des instruments (principalement des spectromètres) de plusieurs télescopes au sol. Semblables à la méthode utilisée pour la détection d'exoplanètes (spectroscopie Doppler), les spectres fournis par ces instruments ont permis d'observer et de mesurer les forces gravitationnelles influençant son orbite.
Ces observations ont alors confirmé la présence d'un compagnon binaire d'environ dix masses solaires. Il s'agirait alors du trou noir le plus proche de notre système solaire.
Des millions de trous noirs dormants
Si la découverte se confirme, il s'agirait alors du premier trou noir de la Voie lactée qui n'a pas été observé sur la base de ses émissions de rayons X ou d'autres rejets énergétiques.
Les modèles prédisent en effet que la Voie lactée contient environ cent millions de trous noirs. Or, nous n'en avons observé qu'une vingtaine, tous observés sont dans des binaires de rayons X. Autrement dit, le trou noir consomme une étoile compagne et brille dans les rayons X lorsque l'énergie potentielle gravitationnelle de ce matériau est transformée en lumière.
Cependant, ces trous noirs ne représenteraient que la pointe de l'iceberg. Une population beaucoup plus importante pourrait en effet se cacher dans des systèmes binaires plus largement espacés. La découverte de cette étude met en lumière l'un de ces binaires et laisse entendre qu'il existe une population plus importante de trous noirs dormants (qui ne brillent pas dans les rayons X) dans la Voie lactée.
Si ces objets sont effectivement omniprésents dans notre galaxie, alors les implications pour l'évolution stellaire et galactique pourraient être profondes.
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