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La BBC a filmé un groupe de jeunes attaquant des voitures de police, en fin d'après-midi dans le quartier de Hackney, à l'est de Londres.BBC
Londres, sous le choc, a connu une troisième journée consécutive de violences et de pillages, qui ont gagné plusieurs quartiers de la capitale ainsi que la ville de Birmingham. Les médias, stupéfaits par ces troubles inédits depuis plus de vingt ans, couvrent les événements en direct, à travers des "live" comme le Guardian ou la BBC.

Le premier ministre, David Cameron, a interrompu ses vacances lundi soir pour rentrer à Londres et va tenir une réunion de crise sur les émeutes dans la capitale, annonce Downing Street.
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De nouveaux affrontements ont éclaté lundi dans le quartier défavorisé de Hackney, dans l'est de la capitale, après les premières violences survenues samedi à Tottenham et tout au long du week-end dans plusieurs quartiers. D'après les images de la BBC, des groupes de jeunes armés de bâtons, de barres de fer et de projectiles ont commencé à s'attaquer aux vitrines de magasins et à des bus en fin d'après-midi, puis ont affronté des policiers en tenue anti-émeute. Au moins un véhicule de police a été détruit.

LES ÉMEUTES S'ÉTENDENT

Les violences ont commencé lors d'une opération de contrôle. Scotland Yard a en effet autorisé dans plusieurs quartiers une procédure exceptionnelle permettant aux agents de procéder à des contrôles d'identité et à des fouilles sans motif précis.

Selon le reporter du Guardian Paul Lewis, qui rend compte des événements sur son compte Twitter, les violences à Hackney sont pires qu'à Enfield la nuit dernière : "Des émeutiers ont pris le contrôle d'une propriété. Ils ont monté des barricades sur plusieurs routes", explique-t-il dans le live de la BBC. Les scènes de violence menaçaient de s'étendre en dehors de la capitale lundi en soirée. Des incidents ont éclaté à Birmingham, dans le centre de l'Angleterre, a annoncé la police. Elles auraient également gagné Leeds.

La police a également dû intervenir à Croydon, Lewisham et Peckham, dans le sud de Londres. A Peckham, des commerces étaient en feu et les flammes menaçaient de se propager à d'autres immeubles alors que des jeunes ont tenté de mettre le feu à un autobus à impériale, selon des images de télévision.

215 ARRESTATIONS

Au total, 215 personnes - dont un garçon de 11 ans - ont été arrêtées depuis le début des violences, a déclaré lundi la ministre de l'intérieur, Theresa May, qui a dû écourter ses vacances. Dans la nuit de dimanche à lundi, au moins neuf membres des forces de l'ordre ont été blessés et 35 pendant le week-end, selon la police qui s'est dite "choquée par cet incroyable niveau de violence à son encontre".

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Un policier dans le quartier de Hackney, lundi.

Un policier dans le quartier de Hackney, lundi.REUTERS/TOBY MELVILLE
La nuit précédente, des petits groupes de jeunes ont harcelé les forces de l'ordre dans d'autres quartiers, endommageant plusieurs de leurs véhicules, détruisant des devantures et pillant des magasins. "Des actes criminels inspirés", selon les services de sécurité, par ceux survenus samedi dans le quartier multiethnique et déshérité de Tottenham (nord).

A Walthamstow, Enfield, Islington (nord), Brixton (sud) et même à Oxford Circus, en plein cœur du Londres touristique, les mêmes scènes se sont reproduites.

Instruite par les débordements de la veille et les vives critiques contre la lenteur de sa réaction, la police, déployée en force, a procédé à 153 nouvelles arrestations, après les 62 interpellations de dimanche.

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Les pompiers éteingnent un immeuble incendié à Tottenham, dimanche.Reuters/LUKE MACGREGOR
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Les pompiers éteingnent un immeuble incendié à Tottenham, dimanche.Reuters/LUKE MACGREGOR
Les troubles ont éclaté dans la foulée d'une manifestation pour réclamer "justice" après la mort jeudi de Mark Duggan lors d'une opération des forces de l'ordre contre la criminalité au sein de la communauté noire.

"ÇA N'A VRAIMENT PAS DE SENS"

"C'est parti visiblement de ce qui s'était passé à Tottenham... Mais ça ressemble fort à une excuse, ça n'a vraiment pas de sens", a déploré Williams Falade, 28 ans, responsable d'un club de gym à Brixton.

Un sentiment partagé par le numéro deux du gouvernement, Nick Clegg, qui s'est rendu à Tottenham lundi et a condamné une "vague de violence gratuite", n'ayant "absolument rien à voir avec la mort de Mark Duggan", un père de famille.


Samedi soir, à Tottenham, un quartier déjà théâtre d'émeutes en 1985, des habitations avaient été brûlées, des véhicules de police et un bus incendiés, 29 personnes blessées, faisant de cette nuit de violences l'une des pires dans la capitale britannique depuis plus de vingt ans.

Lire : "Tottenham, récit d'une nuit d'émeutes"

"LES GENS SONT FRUSTRÉS ET EN COLÈRE"

Une commission de contrôle indépendante a ouvert une enquête sur les circonstances de la mort de Mark Duggan, alors que certaines informations de presse laissaient entendre que les forces de l'ordre avaient ouvert le feu sans avoir été attaquées. Les résultats des expertises balistiques sont attendus mardi.

Abattu par la police alors qu'il se rendait en taxi chez son amie, l'homme transportait une arme à feu, selon les premiers éléments de l'enquête. Au cours de la fusillade, un officier de police avait été blessé par balle, mais d'après des sources policières, la balle pourrait avoir été tirée par un autre officier de police. L'IPCC s'est refusée à commenter l'avancée de l'enquête, mais devrait annoncer d'ici à mardi soir si Mark Duggan avait ou non utilisé une arme avant d'être abattu.

Si les photos de bâtiments en feu faisaient la "une" lundi de tous les journaux britanniques, beaucoup se gardaient de toute interprétation trop rapide. A Tottenham, la question faisait aussi débat parmi les habitants. "On ne peut pas se contenter de dire que ces évènements sont dus simplement à ce décès ou à des criminels", estime Osagyefo Tongogara, un résident de longue date. "J'appelle ça une rébellion. Les gens sont frustrés et en colère".