Image
© inconnu
La première comète, nommée 103P/Hartley 2, à renfermer une eau similaire à celle des océans terrestres, vient d'être découverte. Ce résultat relance le débat à propos de l'origine de l'eau sur la planète bleue. Certains petits corps glacés du Système solaire pourraient bien avoir joué un rôle d'apport céleste. Une équipe de chercheurs internationale a obtenu ce résultat grâce au télescope infrarouge Herschel de l'Agence Spatiale Européenne (ESA). L'information est en ligne sur nature.com et bientôt dans la revue Nature.

D'où vient l'eau des océans ?

La question taraude les scientifiques depuis des décennies. Ils penchent aujourd'hui unanimement en faveur d'une origine extraterrestre de l'eau qui couvre les deux tiers du globe. La Terre était sèche et chaude à l'origine. La molécule d'eau y aurait, ensuite, été apportée par le bombardement de corps célestes. Comment ? Et par quel type d'objets : météorites, astéroïdes, comètes ? C'est tout l'enjeu du débat que viennent enrichir les dernières données d'observation de la comète Hartley 2, obtenues par le télescope spatial infrarouge européen Herschel.

Ce résultat provient d'une étude menée en ondes submillimétriques, inobservables depuis le sol. L'équipe internationale, qui inclut des chercheurs du Laboratoire d'Études Spatiales et d'Instrumentation en Astrophysique LESIA (1), a détecté pour la première fois l'eau mi-lourde HDO, forme particulière de l'eau H2O, au sein d'une comète issue de la ceinture de Kuiper, vaste réservoir d'objets glacés qui s'étend à grande distance du Soleil, au-delà de Neptune.

Des astéroïdes ?

Un bon outil de diagnostic physico-chimique est le rapport relatif entre les abondances de deux molécules : l'eau ordinaire H2O (deux atomes d'hydrogène et un atome d'oxygène) et l'eau mi-lourde HDO où un atome de deutérium (deux fois plus lourd) remplace un hydrogène. Dans les océans, le rapport deutérium à hydrogène D/H vaut environ 0,0156 % : un chiffre similaire à celui trouvé dans les météorites issues de la ceinture des astéroïdes entre Mars et Jupiter. Dans les six comètes étudiées jusque là, dont les célèbres Halley et Hale-Bopp, le rapport apparaît deux fois supérieur à celui trouvé sur Terre. Ceci semblait identifier les astéroïdes comme la principale source de l'eau terrestre. Les comètes n'auraient pas contribué pour plus de 10 %.

... Ou bien des comètes ?

La nouvelle étude ramène pourtant ces dernières sur le devant de la scène : les comètes auraient bel et bien pu contribuer à l'eau terrestre. Hartley 2 découverte en 1986 est réapparue dans le ciel à quatre reprises depuis. Sa dernière incursion est intervenue en 2010. Le 20 octobre, elle est passée au plus près de la Terre, à 16 millions de kilomètres. Le télescope Herschel a ainsi pu la scruter le 17 novembre. Le rapport deutérium/hydrogène relevé est de 0,016 %. Une valeur semblable à celle des océans.

Ce résultat inattendu reflète sans doute la provenance spécifique de la comète Hartley 2 qui revient aujourd'hui tous les six ans près du Soleil : très probablement née au sein de la ceinture de Kuiper, au-delà de Neptune, elle a pu en être éjectée il y a quelques dizaines à centaines de milliers d'années. D'où sa composition différente. De leur côté, les six comètes précédemment étudiées se seraient formées près des planètes géantes du Système solaire.

Le réservoir de petits corps présentant une eau semblable à celle de la Terre s'avère plus grand que prévu : il s'étend bien au-delà de la ceinture des astéroïdes, entre Mars et Jupiter, et irait jusqu'à la ceinture cométaire de Kuiper, au delà de Neptune.

L'eau des océans pourrait avoir été apportée jadis par une pluie d'icebergs cosmiques.

Notes
(1) Observatoire de Paris, CNRS, Université Pierre et Marie Curie, Université Paris Diderot

Référence
Les résultats sont publiés dans l'article Ocean-like water in the Jupiter-family comet 103P/Hartley 2 qui paraît le 5 octobre 2011 sur www.nature.com et le 13 octobre dans Nature.

Voir le communiqué de presse de l'Observatoire de Paris, 5 octobre 2011
Voir le communiqué de l'ESA (en anglais)