Le changement climatique risque d'être aussi une menace pour la sécurité dans le monde: l'idée développée jusqu'ici par les seuls écologistes et quelques universitaires, commence à inquiéter de plus en plus d'hommes politiques et de responsables de la Défense.

Les sécheresses et inondations avec leur lot de récoltes détruites et élévations du niveau de la mer entraînant famines, épidémies et destruction de logements, risquent, à leur tour, d'attiser les tensions et provoquer des manifestations de violence, selon les experts.

Le conflit du Darfour au Soudan, causé par une sécheresse exceptionnelle qui a contraint les populations d'éleveurs à fuir vers d'autres terres, en est l'illustration.

«Non seulement le changement climatique exacerbe les menaces pour la paix et la sécurité internationale, mais il est lui-même une menace pour la paix et la sécurité internationale», a souligné en juillet dernier le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, lors d'un débat du Conseil de Sécurité.

Le Pentagone, dans son rapport quadriennal de Défense 2010, a indiqué que le changement climatique «pourrait avoir des impacts géopolitiques importants dans le monde, et contribuer ainsi à la pauvreté, la dégradation de l'environnement et l'affaiblissement des gouvernements déjà fragilisés».

«Alors que le changement climatique ne déclenche pas directement de conflits, il pourrait agir comme un accélérateur d'instabilité et de conflits», selon ce rapport.

Déplacements massifs de population

L'amiral Neil Morisetti, chargé des questions liées au climat et à la sécurité énergétique au ministre britannique de la Défense, s'est interrogé récemment, lors d'une conférence à Londres, sur les raisons et conditions de migration des populations ayant perdu leurs terres pour des raisons de changement climatique.

«Si elles décident de migrer, est-ce fait de façon planifiée, coordonnée, bien gérée dans un autre pays ou dans des zones entre pays? Ou bien ces déplacements massifs de populations sont-ils la cause de tensions?»

«Si ces populations ont perdu leurs moyens d'assurer leur existence suite à une montée des eaux, à des canicules ou à la perte de leurs récoltes, vont-elles retrouver des moyens légaux de vivre? Ou sont-elles susceptibles d'être recrutées dans des cercles criminels, voire de finir terroriste payé cinq dollars par jour et muni d'un fusil Ak-47?»

Une équipe de chercheurs internationaux, dans un article publié dans le mensuel américain Science en octobre, a souligné que la migration liée au changement climatique était déjà en cours dans le delta du Mékong au Vietnam, le long du fleuve Limpopo au Mozambique, en Mongolie intérieure en Chine, le long de la côte de l'Alaska et dans les îles Carteret en Papouasie-Nouvelle Guinée.

Ces chercheurs ont lancé un appel à adapter la législation nationale et internationale pour assurer une migration équitable et dans les meilleures conditions pour les populations concernées.

Les menaces pour la sécurité viendront également de plus en plus de la santé -en particulier de l'expansion des moustiques et des maladies liées à l'eau insalubre- et du risque amplifié de famine et pauvreté du fait de la hausse des prix des produits alimentaires.

En février dernier, la Banque mondiale estimait que 44 millions de personnes dans les pays en développement avaient sombré dans l'extrême pauvreté à cause de la flambée des prix de l'alimentation.